• vendredi 06 décembre 2024 12 h 05

  • Météo

    -2°C

  • Marées

Actualités

Sports et loisirs
13 novembre 2024 15 h 40

À Noël, cette année, demandez un budget participatif!

Partager

MARIA | Le temps des Fêtes approche, et vous ne savez pas quoi demander comme cadeau cette année? Alors, si vous n’en avez pas déjà un chez-vous, j’ai une suggestion à faire; demandez un budget participatif à votre conseil municipal!

Quelques municipalités et villes gaspésiennes possèdent un budget participatif et, année après année, elles recueillent auprès des citoyens des suggestions de projets dans des domaines propres à leurs champs d’intervention comme les loisirs et les parcs, la culture, l’environnement et autres…

Mais qu’est qu’un budget participatif ?

Si l’on se fie à Wikipédia, « le budget participatif est un processus de démocratie participative dans lequel des citoyens peuvent affecter une partie du budget de leur collectivité territoriale, généralement à des projets d’investissement ». Dans nos mots, nous dirions que c’est un processus par lequel les gens d’une ville ou d’une municipalité peuvent soumettre des projets d’aménagement ou d’équipements, plutôt modestes, à partir d’une enveloppe budgétaire et des règles de fonctionnement préétablies par le conseil de la ville ou de la municipalité.

La notion de budget participatif a pris ses origines à la fin des années 1980 dans la région de Porto Alegre, au Brésil. Depuis, ce principe s’est déployé un peu partout dans le monde et les adhérents se comptent par centaines.


La Ville de Gaspé est l’une de celles qui ont adopté un budget participatif, avec à la clef 50 000 $ pour le projet gagnant. L’un d’eux projette l’implantation d’un terrain de pickleball à Cap-aux-Os. Photo : unsplash.com

Le fonctionnement ?

Il y a bien sûr des variantes d’un endroit à un autre, mais en général, l’entité qui adhère au budget participatif suit à peu près les étapes suivantes, échelonnées plus ou moins sur une année :
• Le conseil de la ville ou de la municipalité adopte la notion de budget participatif et prévoit, à son budget annuel, les sommes qui y seront allouées ainsi que les modalités de participation et les règles;
• Il y a par la suite la création d’un comité pour le budget participatif formé d’élus, d’employés municipaux, de citoyens ou autres qui a pour principal mandat le suivi du déroulement et de sa mise en oeuvre;
• S’ensuit une campagne publique de promotion pour que la communauté puisse être bien informée de l’existence du programme et adhère le plus possible à sa réussite;
• Arrive le temps où les citoyens proposent des idées de projets selon leurs intérêts et ce qu’ils pensent être le plus profitable au plus grand nombre possible de personnes;
• Le comité du budget participatif collecte les idées de projets, procède à une première analyse technique qui se fait généralement par les services municipaux. Le projet est-il faisable? Est-il légal? Combien peut-il coûter? Répond-il à tous les critères du programme local? Au besoin, le comité de suivi rencontrera les citoyens promoteurs de projets pour mieux saisir leurs suggestions;
• Vient ensuite la présentation des projets à la population. À cette étape, chaque milieu y va de sa couleur locale : présentation en ligne, présentation officielle lors d’une soirée publique, etc. ;
• Enfin, arrive le moment tant attendu par les citoyens promoteurs de projets, c’est-à-dire le vote du public pour déterminer le projet qui sera retenu pour réalisation (ou plus d’un projet s’il y a plusieurs catégories) ;
• Une fois le gagnant déterminé, le projet est soumis au conseil municipal pour une approbation finale;
• Après le dévoilement du gagnant au grand public, c’est l’étape de la mise en oeuvre du projet, généralement exécutée par les services municipaux ou par un contractuel dans certains cas.

Critères généraux

Si vous jetez un coup d’oeil aux municipalités qui offrent à leurs citoyens un budget participatif, vous remarquerez que des critères généraux sont communs à l’ensemble de celles-ci et servent de base à cet exercice démocratique, c’est-à-dire que :
• Les projets soumis doivent être dans la catégorie des immobilisations ou des équipements et non des opérations. Concrètement, cela signifie que le budget participatif pourrait, par exemple, servir à un parc de jeux pour enfants, mais non à l’embauche d’une personne pour sa surveillance ;
• Le projet doit être durable, doit respecter le budget fixé par la ville ou la municipalité et être réalisable à court terme (idéalement à l’intérieur d’une période de 12 mois) ;
• Les projets privés ne sont pas admissibles et les projets publics qui le sont ne doivent pas viser des groupes trop restreints ;
• Les projets doivent être situés sur le territoire de la municipalité de qui relève le budget participatif et s’inscrire dans leurs champs de compétence. Il doit aussi être conforme aux lois et aux plans de développement en cours ;
• Enfin, le projet ne doit pas imposer de frais récurrents importants comme des frais d’exploitation onéreux, l’embauche de personnel, etc.

Les bénéfices

Les bénéfices d’un budget participatif sont nombreux, le plus important étant bien entendu le rapprochement entre les élus et les citoyens en regard de certains aspects du développement de leur collectivité. Même si dans bien des cas, les budgets alloués ne sont pas énormes, l’exercice permet aux citoyens de mieux comprendre le fonctionnement du budget municipal en lien avec les immobilisations et les équipements, d’avoir l’impression de s’en approprier une partie, si petite soit-elle, et d’accroître leur sentiment de fierté et d’appartenance. Aussi, très souvent, en cours de réalisation, les échanges entre les élus et les citoyens débordent du cadre du budget participatif, pour s’étendre sur la vision de chacun en lien avec le développement plus large de la communauté…

Bien sûr, tout n’est pas toujours parfait. Des municipalités ont adopté le principe du budget participatif, pour ensuite l’abandonner. Les raisons invoquées : manque d’intérêt dans la population, attentes trop élevées, surcharge de travail pour les services municipaux, déception entre l’idée de base et le projet, dépassement de coûts, etc. Parfois, le budget participatif apporte aussi de la grogne à l’intérieur même de l’équipe municipale; pourquoi rajouter de nouveaux équipements alors qu’on peine à entretenir ceux que nous possédons? Il y a également un danger de faire de l’exclusion auprès de certaines clientèles, notamment les jeunes, les personnes âgées ou les plus démunis, avec des procédures trop complexes ou inaccessibles pour certains.

Une véritable remise de pouvoir aux citoyens ou une opération de relations publiques?

Certains pourraient croire que derrière le projet de budget participatif, se cachent d’autres intentions de la part des élus municipaux comme une opération de relations publiques, la volonté de bien paraître ou de soigner leur image … Mais peu importe, il ne faut pas oublier que ce projet comporte plusieurs valeurs éducatives et a pour principal vertu le rapprochement entre le citoyen et l’élu …

Si vous êtes sceptique, rien de tel que de l’essayer ou encore de le réessayer! Les citoyens se sentiront valorisés s’ils ont l’impression que le « savoir populaire » est considéré par leurs élus. À l’heure où les relations sont parfois tendues entre les élus et les citoyens, que les détracteurs s’en donnent à coeur joie sur les réseaux sociaux, il serait pertinent d’envisager localement des mécanismes de rapprochement des parties en cause comme le budget participatif.

Préparez votre demande

L’automne, dans le monde municipal, c’est la saison du budget. C’est donc le temps de faire votre demande pour l’année subséquente. Si vous êtes convainquant et avec un peu de chance, vous pourrez possiblement rencontrer le « maire Noël » lui-même et qui sait, peut-être aurez-vous sous le sapin vous aussi votre budget participatif! D’ici là, soyez sage!

Joyeux temps des Fêtes!

NOTE DE L’AUTEUR :
L’auteur tient à remercier Martin Gilbert, directeur du service des loisirs, culture et vie communautaire à la Ville de Matane pour sa collaboration à la rédaction de cette chronique.