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26 octobre 2012 11 h 12

Un pas de plus vers un certain contrôle des phoques

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L’Association des chasseurs de phoques des Îles-de-la-Madeleine se réjouit de la décision rendue par un comité sénatorial de recommander le prélèvement de 70 000 phoques gris dans le golfe Saint-Laurent sur une période de quatre ans.

Ce prélèvement viserait à supporter le rétablissement des stocks de morue et des autres espèces de poissons de fond, dont la biomasse stagne ou baisse en dépit de trois moratoires qui ont couvert l’essentiel des 20 dernières années.

La prédation par les phoques est l’un des trois principaux facteurs ayant contribué au déclin des stocks de poissons de fond. La surpêche des années 1970 et 1980, de même que des conditions environnementales, notamment une succession d’hivers froids au début des années 1990, sont identifiées comme les autres causes importantes de déclin.

«Le comité confirme ce qu’on dit depuis des années, pour deux raisons. La chasse est bonne pour la communauté et l’environnement. Le comité veut aussi que ce soit fait selon les normes. C’est la chasse la plus étudiée, en fonction des méthodes, des armes utilisées et de la formation de ceux qui la pratiquent. Nous sommes d’accord avec tous ces principes», signale Gil Thériault, coordonnateur de l’Association des chasseurs de phoques.

Les nuances

Il a noté avec satisfaction les nuances du document sénatorial. «Il ne suggère pas l’abattage pour le seul besoin de contrôle de la population. C’est aussi une ressource à exploiter de façon commerciale. Ce n’est pas seulement un coût net pour le gouvernement. Ça doit rapporter de l’argent, au lieu d’être un truc financé par le gouvernement. Ce n’est pas une question de tuer des bêtes en échange d’un «bounty» [une prime]», ajoute M. Thériault.

Phoque gris

Il y a environ 350 000 phoques gris dans le golfe Saint-Laurent. Chacun de ces mammifères mange plus d’une tonne de poisson par an et plus de 10% de ce menu est constitué de morue.

Le phoque du Groenland est beaucoup plus nombreux, avec 10 millions de spécimens. C’est l’espèce qui est chassée chaque printemps par les Madelinots, qui vont en bateaux pour atteindre la banquise quand il s’agit de l’activité commerciale. Les chasseurs artisanaux foulent surtout les rives des Îles.

Les chasseurs madelinots et des provinces atlantiques ont le droit de prélever 400 000 de ces phoques par an. Leurs prises n’ont atteint que 80 000 bêtes le printemps dernier. «Les marchés ne sont pas bons et le coût de se rendre sur la banquise est trop élevé, à un moment donné», précise Gil Thériault.

L’absence de glace a aussi compliqué la tâche des chasseurs depuis quelques années. L’ouverture d’une chasse au phoque gris solutionnerait une partie du problème de viabilité économique et d’accès à la ressource.

«C’est une espèce plus sédentaire. Il reste sur nos côtes toute l’année. Le phoque du Groenland vient dans un grand coup, le printemps et après, c’est fini. On peut chasser le phoque gris toute l’année», explique Gil Thériault.

La courte durée de la chasse au phoque du Groenland a pour effet de ne pas combler la demande de viande de phoque d’un secteur encore modeste, mais néanmoins en développement aux Îles-de-la-Madeleine.

«En plus, la viande de phoque gris est meilleure, et plus rosée», signale M. Thériault, glissant au passage qu’il a été critique culinaire.

Pas en 2013

Il serait étonnant que la chasse au phoque gris débute en 2013. La recommandation du comité sénatorial reste à entériner par le Parlement fédéral et plusieurs études doivent être menées avant d’autoriser l’arrivée de phoque gris chez des détaillants en alimentation.

«Des études sont à faire par le MAPAQ [ministère de l’Agriculture, des Pêcheries et de l’Alimentation du Québec pour voir si la viande est contaminée, à propos de la qualité de l’huile et la peau], note M. Thériault.

Il faudra aussi établir la faisabilité économique de l’activité. «Il faudra un appui financier au début, notamment parce que la capacité de transformation est maintenant limitée», dit-il.

Aux Îles, La firme Tamasu dispose d’un peu d’équipement, mais si quelques milliers de phoques gris s’ajoutent au volume de phoques du Groenland, il faudra doter l’usine d’autres machines.

Jusque dans les années 1970, la saison de chasse au phoque aux Îles était presque aussi importante que la pêche du homard. Il reste 1 000 détenteurs de permis de chasse dans l’archipel mais de 50 à 60 personnes l’ont utilisé à des fins commerciales l’an passé, et entre 100 et 200 à des fins artisanales.

«Nous avons fait faire une étude sur ce que serait aujourd’hui la chasse au phoque aux Îles s’il n’y avait pas eu les campagnes des groupes animaliers des années 1970. Ce serait une industrie qui rapporterait autour de 40 millions de dollars par an aux Madelinots, juste un peu moins que les 50 millions$ du homard. Présentement, ça donne environ 100 000$ de retombées par an», note Gil Thériault.

Les troupeaux de phoques ont au moins quintuplé en nombre depuis 35 ans. Le déclin du poisson de fond qui a caractérisé le tournant des années 1990 a affecté au moins 2 000 pêcheurs et travailleurs d’usines de la Gaspésie et des Îles-de-la-Madeleine.