Dame Nature repousse la saison de pêche au homard
Le mauvais temps des derniers jours oblige les pêcheurs de homard à rester à quai depuis la fin de semaine, et les prévisions ne sont guères optimistes.
Le directeur du Regroupement des pêcheurs professionnels du sud de la Gaspésie, O’Neil Cloutier, indique que la meilleure fenêtre cette semaine semble vouloir se dessiner pour jeudi, au plus tôt. De forts vents du sud-est sont à prévoir au cours des prochains jours, «une situation désastreuse», dit-il, pour ce début de saison.
«Mon idée est qu’on ne prendra pas grand-chose avant la fin de la semaine», ajoute-t-il.
Mais une fois qu’elle démarrera, cette saison sera prometteuse. «Les avis scientifiques font état d’un stock en bonne condition. Ça devrait être bon d’après ce qu’on peut voir, si la ressource est là. On pourrait espérer une hausse des captures de 10 %», dit-il, prudemment.
Tout comme les autres types de pêche, la rentabilité demande toujours des efforts d’imagination constants. «On sait que les coûts d’exploitation vont être plus chers», explique M. Cloutier, lui-même pêcheur de homard.
En effet, les coûts des appâts, dans ce cas-ci, le maquereau, est à 1 $ la livre actuellement, ce qui vient réduire d’autant le prix obtenu pour une livre de homard, dont on ne connaît pas encore à ce moment-ci le prix qui sera payé au quai. Le coût du carburant mettra aussi beaucoup de pression sur les opérations cette année. «L’an dernier, le prix moyen était à 4,55 $ la livre, mais il a déjà été à 5 $ en 2006.»
Le directeur du regroupement calcule. «Il faudrait pêcher entre 16 000 et 17 000 livres de homard pour faire un bon revenu, compte tenu des prix actuels. Mais en moyenne, on obtient une dizaine de milliers de livres. En 2008-2009, on pêchait moins de 10 000 livres», dit M. Cloutier pour illustrer la difficulté de générer un bénéfice alors qu’à sa meilleure saison, «il y a sept ou huit ans», il avait recueilli 20 000 livres.
Avec la zone de pêche, les homardiers gaspésiens ne pourront espérer plus en terme de volume. «À l’Île-du-Prince-Édouard, un pêcheur peut amasser 50 000 livres, de 40 000 à 45 000 livres au Nouveau-Brunswick et 22 000 livres aux Îles-de-la-Madeleine. Les pêcheurs gaspésiens doivent se contenter de 8 000 à 10 000 livres », illustre le pêcheur pour démontrer la difficulté de l’industrie locale.
Cette situation s’explique par la topographie du fond marin, alors que les hauts fonds s’avancent beaucoup plus loin dans la mer dans ces régions qu’en Gaspésie. «Le nombre de homards capturés a doublé partout ailleurs, passant de 50 000 tonnes métriques à 100 000 tonnes métriques.»
La valorisation du produit québécois permettra d’assurer la survie de l’industrie sur la côte gaspésienne, croit le pêcheur. «On fait beaucoup d’efforts sur la commercialisation du homard gaspésien pour démontrer sa valeur et ses retombées aux consommateurs d’ici. On travaille aussi beaucoup sur les marchés d’exportation, notamment vers la Chine pour tirer un meilleur revenu, expliquer M. Cloutier. À un moment donné, ça va payer plus.»
La Gaspésie compte 182 pêcheurs professionnels au homard, sans compter les autochtones.
Si Dame nature finit par collaborer, la pêche durera 68 jours.