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17 août 2018 12 h 23

Les technologies au service de la relève agricole

Gilles Gagné

Journaliste

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SAINT-ANDRÉ-DE-RESTIGOUCHE, août 2018– À 24 ans, Maude Lagacé possède déjà 51% de la ferme laitière Bel horizon, de Saint-André-de-Restigouche. Il s’agit de l’une des plus importantes fermes laitières de la Gaspésie, et la première à avoir intégré un robot de traite dans la région. Premier de trois textes sur la relève agricole.

Depuis 20 ans, la Gaspésie a perdu le quart de ses fermes, même si la valeur de la production se maintient. L’Association pour la relève agricole de la Gaspésie et des Îles-de-la-Madeleine implante d’ailleurs un programme, les Éclaireurs, pour appuyer des jeunes tentés par l’agriculture. GRAFFICI s’intéresse ici à des entrepreneurs qui ont foncé de leur propre chef.

Le père de Maude Lagacé, Bruno, et sa mère Diane possèdent encore les 49 % restants des actions de la ferme, et Maude ne serait pas devenue propriétaire majoritaire sans l’appui de ses parents. Cette condition était nécessaire pour le transfert d’une part du quota de lait à son nom.

La famille Lagacé vient de compléter un investissement de 1,5 M$ pour bâtir une nouvelle grange, acheter du quota et doter la ferme du robot de traite, un équipement valant à lui seul 250 000 $.

« J’ai toujours eu le goût de prendre la relève. Quand tu grandis, tu y vas en fonction des tâches que tu es capable de faire », souligne Maude, qui a terminé il y a quatre ans un diplôme d’études collégiales en gestion et exploitation d’entreprise agricole, à l’Institut de technologie agricole (ITA) de La Pocatière.

Les six enfants Lagacé ont travaillé à la ferme, et quatre d’entre eux restent liés à l’agriculture, en incluant Mylène qui étudie encore à l’Institut de technologie agricole. Jean-Pascal travaille avec Maude, mais il ne veut pas être actionnaire. Ils incarnent la quatrième génération des Lagacé en production laitière.

Améliorer sa qualité de vie

Maude savait dans quoi elle s’embarquait, en production laitière, un type d’agriculture extrêmement exigeant à cause de la traite des vaches nécessaire de deux à quatre fois par jour, selon l’état de lactation de l’animal.

C’est en raison du désir d’améliorer la qualité de vie de leur relève que Diane et Bruno Lagacé ont décidé d’investir dans le robot de traite.

«Je ne voulais pas qu’elle mène la même vie que moi», signale M. Lagacé. «Avant, ça prenait trois personnes pour la traite. Oui, c’est sept jours par semaine, une ferme laitière. C’est le fun d’avoir des congés mais c’est cette vie que j’ai choisie. Si j’avais voulu avoir toutes mes fins de semaine, j’aurais choisi autre chose », enchaîne Maude.

« Il faut penser au bien-être des producteurs, après ce qu’on a fait pour le bien-être des animaux », complètent le père et la fille.

Un robot pour traire les vaches

Chacune de leurs 65 vaches laitières porte une médaille reconnue par le lecteur du robot. L’ordinateur connaît le moment de la journée au cours duquel chaque vache est sensée aller se faire traire. La barrière du robot ne s’ouvre pour telle ou telle vache qu’au moment de la bonne case horaire.

« Il faut programmer le robot en fonction du stade de lactation de chacune », précise Maude. « C’est aussi la moulée qui les attire », note son père.

La technologie a été acquise par Maude à la ferme, avec le fournisseur d’équipement. « À l’ITA, ils ne nous montrent pas ça, le côté technique […]. Je connaissais les chiffres de la ferme. Pour quelqu’un qui ne connaît rien là-dessus, ça peut faire peur mais j’ai pataugé là-dedans depuis le début », dit-elle.

Les ajustements pour adapter les commandes du robot en fonction du stade de lactation de chaque vache sont fréquents. « Il faut aussi interpréter régulièrement les données fournies sinon, tu n’utilises pas le potentiel de la technologie », insiste Bruno Lagacé.

En fait, l’apprivoisement des technologies aide les Lagacé à composer avec d’autres défis, dont les inquiétudes liées à la menace pesant sur la gestion de l’offre au Canada, le système de quota que bien des Américains, Donald Trump en tête, voudrait abolir ici.

« Depuis que je suis là-dedans, les quotas vont tomber. En 1980, le GATT était la menace. On s’en est toujours sortis. C’est le bas prix obtenu pour le lait qui est fatigant », souligne Bruno Lagacé.

Maude sait qu’elle pourra compter sur ses parents pour assurer une douce transition de propriété. « Ce sont des gros montants, une ferme laitière. »

« On vient d’investir 1,5 M$. On a racheté du quota. Pour arriver, il faut grossir. Si on rachète du quota, ça prend de la machinerie un peu plus grosse. Mais je ne suis pas de ceux qui vont vendre pour ramasser le magot», dit le père, sous le regard reconnaissant de Maude.

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