• jeudi 18 avril 2024 13 h 58

  • Météo

    4°C

  • Marées

Actualités

21 février 2013 15 h 33

Maintenant de Natalie Mecteau : écrire pour mieux guérir

Partager

«Qu’est-ce que tu fais dans la vie?», demande l’homme. «Je fais une dépression. Quand je me couche le soir, je rêve de ne pas me réveiller le lendemain matin!», répond la dame.

La scène se passe il y a trois ans dans un bar de Carleton. L’homme, c’est Louis Sleigher, l’ancien joueur de hockey de la Ligue nationale, natif de Nouvelle, revenu vivre dans sa région.

La dame, c’est Natalie Mecteau, enseignante d’anglais en congé de maladie, originaire de Québec, vivant en Gaspésie depuis une quinzaine d’années.

La rencontre

Au moment de l’échange de propos, Louis Sleigher et Natalie Mecteau ne se connaissent que de vue. Ils se sont retrouvés assis à la même table parce qu’ils ont des amis en commun. L’ancien joueur des Nordiques de Québec et des Bruins de Boston est touché par la franchise de l’enseignante. Il a déjà fait une dépression, et comprend le désarroi de Natalie Mecteau.

Les deux forment un couple maintenant, mais il a fallu quelques détours à Natalie Mecteau avant de lui faire une place dans sa vie intime.

Le récit

Auteur du livre «Maintenant», lancé récemment et dans lequel elle raconte l’histoire de sa dépression, Mme Mecteau a mis 13 ans avant de s’avouer qu’elle n’était pas faire pour l’enseignement. Elle a passé une quatorzième année à refuser d’admettre qu’elle était plongée en pleine dépression.

«Le matin, j’avais une boule dans la gorge avant d’aller à l’école. Je vivais avec la peur de ne pas avoir la crédibilité auprès des élèves. Mon temps d’enseignement était éparpillé dans des classes de trois écoles, donc trois directions. Le sentiment d’appartenance était inexistant. Je me disais: c’est ça, travailler! Ce doit être ça la vie. C’est ça, gagner ta vie. Ça se fait dans la douleur. Mon but était de prendre ma pilule, d’apprendre à endurer et à me taire. J’avais peur de rencontrer les parents, peur de décevoir. Les gros yeux que je voyais au Métro [au supermarché], ça me rentrait dedans, comme les appels des parents chez moi», se souvient-elle.

Elle s’est dirigée vers l’enseignement de l’anglais par défaut, parce que sa faiblesse en mathématiques limitait ses choix à l’université. L’enseignement lui pèse tellement qu’elle se remémore avec nostalgie les accouchements de ses deux enfants, maintenant âgés de 14 et 13 ans, et des moins beaux bouts souvent associés aux bébés.

«Les couches, les suces, les crises le soir, emmenez-en! J’aurais eu des quintuplés juste pour ne pas retourner à l’école», dit-elle, en prenant bien soin de dire qu’elle adore son fils et sa fille.

Elle retourne enseigner peu après le début de nouveau millénaire, mais à partir de 2004, elle amorce une longue descente qui prendra une tournure précipitée en février 2009, lors du suicide d’un copain.

«Je suis en panique à l’école. Je fais comprendre aux gens qui sont là que je suis la prochaine à faire l’irréparable, le soir même si je peux», note-t-elle.

Les années 2009 et 2010 seront marquées par un long processus de prise de conscience de son état et, pour alourdir les choses, de l’accompagnement de son père, victime d’un cancer, durant les derniers mois de sa vie. Il refusera le pacte de suicide qu’elle lui propose et s’engage à veiller sur elle, d’où il sera, après sa mort.

Espoir

Après une consultation particulièrement pénible avec une spécialiste, Natalie Mecteau rencontre une omnipraticienne qui lui donnera l’humanité dont elle a besoin. «Geneviève Jobin m’a sauvée», dit-elle sans hésitation.

«Elle m’a dit : tu es une artiste. C’est vrai. J’aime la musique, chanter, rire. J’aime les couleurs. Je suis une romantique rebelle. Écouter de la musique et couper des légumes pour recevoir des amis à manger, c’est le bonheur», assure-t-elle.

Natalie Mecteau écrit depuis son adolescence, marquée par quelques durs moments avec ses collègues de classe. Elle découvre depuis trois ans que l’écriture l’aide à sortir de sa torpeur et,  surtout, à aider les autres, ce qui redonne un sens à sa vie.

Renfermée, d’une rare timidité, l’ancienne Natalie a fait place à une femme de plus en plus assurée. Depuis le lancement de son livre, elle a donné des entrevues, elle a parlé en public, et elle adore ce qui l’aurait rendue malade il y a deux ou trois ans.

«J’ai l’impression d’être dans un utérus, de ne pas être née. Je vais naître bientôt. Je n’ai rien à faire du monde que je n’aime pas», dit-elle.

«Maintenant», un livre de 60 pages, est publié aux Éditions du Panthéon, de France. L’auteure a aussi une page Facebook intitulée La dépression et l’intimidation.

Étiquettes :