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9 mai 2019 17 h 13

Rencontre avec Rose-Hélène Tremblay Gardienne de la mémoire et «défaiseuse de nœuds»

« Il faut poursuivre la révolution. Transmettre l’art de la résistance à la jeunesse. Faut dénouer les nœuds personnels dans nos vies, mais aussi ceux de la société. La transmission, c’est ça le plus important. Garder la mémoire pour la transmettre. »

C’est ainsi que Rose-Hélène Tremblay a conclu notre entretien à la Boulangerie La Pétrie, à Bonaventure, dans le brouhaha d’un samedi matin de mars. Pourquoi commencer par la fin? Parce que celle-ci m’a semblé aussi savoureuse que le café que je sirotais, tout en m’abreuvant des paroles de cette femme on ne peut plus colorée et inspirante.

Le but de l’entrevue était de mieux connaître cette réputée résidente de Saint-Siméon, emprunter avec elle le chemin qui l’a menée à l’écriture et, bien sûr, parler de La Révolution des fleurs , le dernier-né d’une vingtaine d’ouvrages signés de sa main.

La Révolution des fleurs présente ce qui a été, pour son auteure, une amorce où une génération a développé de nouvelles habitudes citoyennes, de nouvelles façons d’être. Il s’agit d’une œuvre regroupant une trentaine d’histoires de gens qui sont allés, comme elle, à contre-courant dans les années 1970, juste après l’autre révolution, celle dite tranquille.

« Nous, on n’était plus du tout tranquilles! On s’est opposé à l’autorité. On a essayé de ralentir la progression de la société de consommation. On n’a pas fait basculer le monde, mais on a ouvert une nouvelle porte, avec un nouveau chemin», dit l’auteure, évoquant entre autres le fait qu’il est possible, depuis ce temps, de vivre avec qui on veut sans avoir à se marier, d’avoir un enfant hors mariage, de revenir à la terre, de choisir l’agriculture bio et tant d’autres pratiques de la contre-culture amorcées à l’époque hippie.

« Maintenant, on a le CHOIX ! C’est ça notre grande réussite. On a offert des alternatives», lance fièrement la révolutionnaire.

Rose-Hélène dit avoir voulu écrire La Révolution des fleurs, pour mieux comprendre cette époque de tous les possibles. Le livre présente une trentaine de témoignages où, sous le couvert de l’anonymat, des gens racontent leur histoire en précisant ce que ça leur a donné d’être sorti des sentiers battus.

«Quand on fait la révolution, ce n’est pas toujours élégant. C’est pour ça que je n’ai pas mis les vrais noms. Je n’aurais pas pu raconter ces histoires personnelles et profondes autrement», esplique l’auteur.

L’enfance de l’art

La petite Rose-Hélène a été très tôt envoutée par les histoires. Même avant d’apprendre à lire, elle était fascinée par les récits de ses grands- parents, dont ceux de sa grand-mère qui lui lisait la bible.

«C’est comme une graine qu’ils ont semée, grand-père pis grand-mère. Après, quand j’ai commencé l’école, je trouvais qu’on pouvait lire des choses dans les livres qu’on ne pouvait pas dire dans la réalité. Apprendre à mettre des mots sur les états d’âme, très tôt, j’ai trouvé que c’était pour moi comme une libération», raconte la femme de lettres.

« Le désir de mettre des mots sur les réalités, ça m’a préoccupée très jeune. Au secondaire, je me suis mise à écrire mon journal. Puis, j’écrivais mes rêves, parce que je rêvais beaucoup. Disons que ça a été le chemin qui m’a amenée à la fiction», se souvient l’auteure qui n’a commencé à écrire des romans que dans la trentaine.

«À ce moment-là, j’ai choisi de faire des romans historiques, parce que j’aime me projeter dans le passé, pour comprendre notre histoire et qui on est», explique-t-elle, avouant, bien humblement et sourire en coin, toujours tourner autour de la même thématique. Citant un auteur qu’elle aime bien, elle explique que, d’après lui, un écrivain n’a que deux ou trois choses à dire et qu’il les répète constamment. 

«Je n’échappe pas à la règle, lance-t-elle en riant. J’ai une dizaine de livres derrière moi et quelques autres contes et récits et, je m’en rends bien compte, j’écris toujours la même affaire: ce sont toutes des histoires de guérison, des histoires complexes avec des personnes qui ont des nœuds à l’intérieur d’elles-mêmes et qui, au fil des années, de l’expérience de vie, finissent, ou pas, par dénouer leurs nœuds et ainsi pouvoir se projeter dans le présent, sans porter un bagage qui les alourdit. »

L’œil pétillant, l’auteure avoue d’ailleurs adorer explorer ce qui crée tous ces nœuds et ce qui les dénouent. Aussi, elle est bien déterminée à continuer de nous donner, espérons-le, encore bien des histoires qui sauront transmettre aux générations présentes et à venir, des tranches du passé imprégnées d’un soupçon de résilience et d’une bonne part de résistance.

Auteures et révolitionnaires à la petite école 

Quelques jours après ma rencontre avec Rose-Hélène, j’ai eu le plaisir de rencontrer deux jeunes auteures tout aussi pétillantes que leur aînée et qui, à leur façon, font aussi leur petite révolution. Charlotte Drapeau, 11 ans, et Léa Durand, 12 ans, fréquentent l’école Le Bois vivant de New Richmond. Elles verront leur premier livre publié aux éditions Le Point Bleu, à l’automne 2019.

«Les valeurs de notre livre, c’est de bouger, de bien s’alimenter et d’aller à la rencontre des autres », explique Léa.

Passer par la littérature jeunesse pour faire bouger les jeunes, de pousser ainsi les jeunes à contre-courant d’une tendance lourde qui les colle, seuls, devant leur écran, avec de la malbouffe sous la dent, n’est-ce pas là une délicieuse petite révolution ?

Les deux filles ont d’abord écrit ce livre dans le cadre du Grand défi Bâtir ma région. Mais la mère de Charlotte, Caroline Drapeau, a décidé de pousser l’affaire plus loin en dénichant un éditeur. Ainsi, le livre sera sur les tablettes des librairies, cet automne.



 

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