Transports : la SCFG sous la protection des tribunaux
CARLETON-SUR-MER | La Société du chemin de fer de la Gaspésie a annoncé vendredi qu’elle se place sous la protection des tribunaux parce qu’elle n’arrive pas à rencontrer ses obligations financières, alors qu’elle est en attente depuis plusieurs mois d’un appui financier du gouvernement du Québec.
Le transporteur ferroviaire fait face à des créances impayées de 1,2 M$ et devant l’imminence d’une saisie par l’un de ses créanciers, sa direction a décidé vendredi matin, lors d’une téléconférence, de s’en remettre à un syndic pour gérer la restructuration.
Appartenant aux municipalités situées entre Matapédia et Gaspé, La Société du chemin de fer de la Gaspésie (SCFG) attendait depuis juin un appui d’urgence de L’État québécois. La demande s’établissait à 1,3 M$, mais la réponse se faisait toujours attendre vendredi.
Président de la SCFG, Éric Dubé note que les trains de marchandises continuent de circuler pour desservir les clients entre Matapédia et Caplan, notamment l’usine Temrex de Nouvelle, où 95 % du trafic est généré. Ce trafic représente environ 2000 wagons par an et il augmentera au cours des prochaines années.
Le syndic et la direction de la SCFG, devront soumettre une proposition aux créanciers au cours des six prochains mois.
« C’est un problème de liquidités. On a un actif valant plus que 1,2 M$ (…) Notre valeur aux livres est de 32 M$, et autour de 18 M$ si on devait faire une vente de feu. Il fallait se protéger », indique M. Dubé.
Le ministre D’Amour interpellé sur la question
Vendredi, quand le ministre responsable de la Gaspésie et des Îles, Jean D’Amour a été questionné, avant que la SCFG annonce qu’elle se protégeait de ses créanciers, sur ce que son gouvernement entendait faire pour le chemin de fer. Il avait répondu que l’État avait reçu une demande d’aide d’urgence et qu’il était « sur le point de statuer ».
Trois jours plus tard, M. D’Amour indiquait qu’il avait « été informé de la possibilité (d’un recours initiant la protection de la cour par la SCFG) avant de partir en Gaspésie, mais ce n’était pas à moi d’en parler ».
Il rappelle que depuis 2002, le gouvernement du Québec a versé 48 M$ pour le réseau ferroviaire gaspésien. « L’idée, ce n’est pas de payer de l’argent indéfiniment », mais « on voit comme un nouveau départ (la protection conférée par la cour…) Quand on a acheté (le chemin de fer, en 2007), on répondait à des impératifs régionaux importants. Il y a une période de turbulence. Il faut trouver des solutions. On gère l’argent du monde », dit-il.
Jean D’Amour ne peut dire pour le moment si le gouvernement débloquera les 1,2 M$ nécessaires pour effacer les créances de la SCFG mais il tente de se faire rassurant en affirmant que l’intervention du syndic « nous permet de faire le travail » que le chemin de fer « fait partie des priorités ».
La SCFG avait réduit sa main d’œuvre en juin, il y a donc cinq mois, pour ne garder que le strict minimum requis pour l’entretien de base de la voie entre Matapédia, Nouvelle, New Richmond et Caplan, l’axe desservi par le train de marchandises. L’entretien de base touchait aussi l’axe Gaspé-Percé, où a roulé le train touristique Amiral.
Vendredi, lorsqu’interrogé sur le fait que son gouvernement ne semblait pas pressé d’intervenir pour la voie ferrée, le ministre D’Amour avait rétorqué que « moi, je ne suis pas du genre à saupoudrer (…) Ce qu’on veut, c’est globalement régler ce projet-là. Ce n’est pas vrai qu’on va régler ça à coup de 5, puis de 6 M$. Je voudrais qu’on annonce un projet et qu’il y ait un début, une fin. Je ne veux pas “patcher” la voie ferrée, je veux régler une fois pour toutes (…) Actuellement, on doit finaliser le projet. Il y a eu des problèmes administratifs à la Société du chemin de fer. Chantier Canada pourrait être une avenue (pour aussi contribuer à la réfection) ».
Il n’avait pas spécifié alors ce qu’il entendait par des « problèmes administratifs ». À quelques reprises depuis juin, Éric Dubé a indiqué que la SCFG avait aussi du ménage à faire dans sa propre cour.
Jean D’Amour avait aussi dit vendredi que « la voie ferrée, c’est un projet de 130 M$, c’est un projet qui est majeur, alors on va continuer à travailler sur ces projets-là ».
Questionné à savoir pourquoi il utilise un chiffre, 130 M$, qu’il est le seul à employer, alors que la direction de la SCFG parle de 103 à 107 M$ depuis plus d’un an, M. D’Amour a précisé que le montant incluait « des frais », pour ensuite se raviser et l’ajuster à 100 M$.
Depuis juin, la direction de la SCFG a déposé un projet de remise à niveau du tronçon Matapédia-Gaspé, touchant essentiellement des ponts. Sa réalisation, revue à la baisse, coûterait de 35 à 45 M$ au cours des trois prochaines années, et à 70 M$ en cinq ans.
Suivi des coupures chez Orléans selon le ministre
En ce qui a trait aux mesures à venir pour diminuer l’impact des coupes de services qui entreront en vigueur le 18 janvier à Autocars Orléans Express, Jean D’Amour a précisé que « dès l’annonce, on s’est mis au travail. Robert Poéti (ministre des Transports) y travaille, pas à temps plein, mais il y voit (…) Il y a des solutions intéressantes, réalisables et porteuses pour l’avenir », assure le ministre D’Amour.
Il ne croit toutefois pas qu’elles seront prêtes à temps pour le 18 janvier. « Le temps passe très vite ». Au sujet de la fréquence du service, « toutes les hypothèses sont sur la table », dit-il, à propos de liens qui seront réduits des deux-tiers dans moins de deux mois.
Un oeil sur le prix du transport aérien
À propos des tarifs aériens, un frein au développement de la région en raison de prix prohibitifs, le ministre D’Amour est resté vague, disant que la solution « inclut les compagnies », que l’enjeu a « été discuté avec Robert Poéti (…) que ça nous préoccupe » et qu’il faut régler « l’enjeu global ».
La stratégie maritime en construction
Quant à la stratégie maritime, pour laquelle il est en charge de l’implantation, il précise que la période de consultation s’est terminée le 15 septembre que le plan sera déposé « au cours du premier trimestre de 2015 ».