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26 octobre 2012 15 h 44

Une incursion dans le passé de Saint-Octave-de-l’Avenir

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Treize étudiants inscrits en deuxième année de baccalauréat en architecture de l'Université Laval à Québec sont récemment débarqués à Saint-Octave-de-l'Avenir. Pour eux, c'était une incursion dans le passé de ce village fermé en 1971.

Tout en s’intéressant à l’architecture des rares bâtiments qui ont été épargnés de la démolition, ils se sont initiés à l’histoire de ce village qui a déjà compté environ 1 000 habitants.

Pour bien saisir l’âme de ce village situé à près de 20 kilomètres au sud de Cap-Chat, au pied des monts Chic-Chocs, les onze jeunes femmes et deux jeunes hommes ont écouté religieusement la conférence de près de deux heures de l’historien Jean-Marie Thibault, un spécialiste de l’histoire de l’expropriation de Forillon.

Celui-ci les a instruits sur les actions du Bureau d’aménagement de l’Est-du-Québec (BAEQ) qui avait eu pour tâche, en 1970, de cibler une dizaine de villages dans la Baie-des-Chaleurs, en Haute-Gaspésie et en Matanie, pour les fermer. Parmi ces localités, se trouvait Saint-Octave-de-l’Avenir.

«Je suis né ici, a tenu à rappeler aux étudiants l’auteur-compositeur-interprète Daniel DeShaime, à la fin de l’allocution. Je n’ai pas été exproprié, j’ai été expulsé. Ce que le peuple crée ne meurt pas. Il fallait être libre pour faire Saint-Octave. Ne prenez pas Saint-Octave seulement comme un atelier.»

Le professeur qui avait eu l’idée d’amener ces étudiants au cœur de ce village abandonné, Tania Martin, leur a demandé: «Combien d’entre vous avaient déjà entendu parler de Saint-Octave-de-l’Avenir avant que je vous propose cet atelier?» Aucune main ne s’est levée.

Impression de deux participants

«Il y a un côté humain à ce village, constate un étudiant de la cohorte, Julien Deneault, à l’issue de l’atelier de deux jours. Je ne m’attendais pas à ça. Je suis ému de voir toute la ferveur mise par une communauté dans la construction des bâtiments, de constater toute la liberté que les gens avaient de construire comme ils le voulaient et non comme le gouvernement le voulait. Je m’intéresse d’ailleurs à l’aspect humain en architecture. C’est dans cette voie-là que je veux m’inscrire.»

«Moi, j’étais sceptique avant d’arriver ici, admet sa camarade de classe, Geneviève Deguire, originaire de Boisbriand, non loin de Montréal. Mais j’ai été agréablement surprise, surtout par l’esprit des gens qui ont déjà habité ce village. Ça m’a épatée. Nos hôtes, Daniel DeShaime, Hubert Pelletier et Ginette Fraser, parlent de leur village avec émotion.»

Atelier pratique

Dans le cadre de cet atelier inhérent à la requalification et à l’interprétation du patrimoine, un chargé de formation pratique de l’école d’architecture de l’Université Laval, Gilles Rocheleau, s’est rendu à Saint-Octave afin d’initier les futurs architectes aux notions de relevé architectural et d’analyse de l’état des lieux. Ainsi, une équipe a travaillé sur le couvent, tandis qu’une autre a étudié l’église. Dans les deux cas, ils ont tenu compte de la relation entre ces bâtiments et le site.

«La découverte réside dans ce qui s’est passé ici, indique la professeure de l’école d’architecture de l’Université Laval et titulaire de la Chaire de recherche du Canada en patrimoine religieux bâti, Tania Martin. L’église traduit une fierté et un souci dans la construction. C’est simple, comme bâtiment. Mais c’est le bois qui donne la chaleur au lieu. Le bois est local, tout comme la main-d’oeuvre l’était. On est loin du baroque. Ça se rapproche de l’architecture des églises de cette époque, d’inspiration Dom Bellot. »

«On a fait le relevé de l’église, tant pour son côté qualitatif que quantitatif, souligne Julien Deneault, originaire de Gatineau, en Outaouais. L’entre-toit ou la voûte, c’est impressionnant!»

«C’est encore plus impressionnant quand on pense que ce sont les gens du village qui ont construit ça, continue Geneviève Deguire, âgée de 22 ans. Ils n’étaient pas des architectes, ni des ingénieurs!» L’étudiante a fait le relevé architectural du couvent, qui a connu plusieurs modifications depuis sa construction. «J’avais de la misère à concevoir que c’était un bâtiment d’origine, tellement il a subi de changements», indique-t-elle.

L’idée de départ

Bien que ce soit Mme Martin qui ait proposé cet atelier à ses étudiants, l’idée est venue d’un architecte de Montréal, Jacques Martin, dont les ancêtres provenaient de Saint-Octave-de-l’Avenir. Celui-ci a invité Tania Martin à entrer en communication avec Daniel DeShaime, qui lui a parlé de son projet d’élaboration d’un camp musical au cœur de son village natal.

D’ailleurs, pendant le parcours de près de 550 km, le groupe a fait une halte au Camp musical de Saint-Alexandre-de-Kamouraska, question de pouvoir puiser quelques inspirations.

«On doit élaborer un projet visant à apporter quelque chose au village, précise Julien Deneault, âgé de 20 ans. L’idée de base est un camp musical.» «Les anciens du village n’ont pas arrêté de nous dire merci, alors qu’on n’avait rien fait, se surprend Geneviève Deguire. Ce serait intéressant de venir leur présenter nos projets individuels!»

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