Le rayon des surgelés pour plus de proximité
L’été aux Îles-de-la-Madeleine apporte son lot de touristes et d’anecdotes. Un signe solide que la forte saison est bien arrivée ? Quand vous vous trouvez dans un lieu public, écoutez. Vous entendrez les accents, ils s’entremêlent.
Le lieu par excellence pour observer avec ses yeux ou ses oreilles : l’épicerie. L’été, j’entretiens une relation amour-haine avec ma source d’emplettes. Faire l’épicerie en juillet et en août est parfois ardu et presque toujours déstabilisant. Le bain de foule et l’attente aux caisses, le manque de produits et l’abondance de paniers, le manque de stationnement, le plein de nouveaux visages de passage. Faire l’épicerie ces jours-ci est une folie nécessaire, un divertissement, un théâtre, un ouvrage, une école, un voyage. Dis moi ce que tu manges, je te dirai d’où tu viens Il existe peu d’endroit qui nous donnent vraiment accès à la nature même de tous et chacun.
À l’épicerie, on choisit, on hésite, on repousse, on discute, on s’impatiente, on questionne, on s’obstine. À l’épicerie, lorsqu’on y va tous les jours, lorsque c’est « notre » épicerie, on fonctionne un peu sous le mode radar, on sait où on va, dans quelle rangée sont les petits pois et le riz basmati. Quand les touristes débarquent dans cette même rangée et qu’ils discutent entre eux j’ai toujours l’impression qu’ils cherchent ce qui n’existe pas : l’huile de pavot bleu, le lapin nain bio ou le lait de chèvre avec Oméga 9. Mieux vaut en rire. Veux tu être mon ami ?
Dans ce contexte estival boosté aux coup de soleil, au sable dans les sandales et aux congestions routières, quand à l’épicerie, je croise un visage connu même si je n’ai jamais parlé à cette personne, j’ai envie de saluer, de devenir son ami l’instant d’un « bonjour » bien senti.
Avez-vous déjà croisé quelqu’un de votre village sur un trottoir à Montréal, une personnalité publique québécoise sur un trottoir parisien ? La sensation est comparable. Le plaisir de voir l’été arriver sur l’archipel est inévitablement marié au plaisir de voir sa vie quotidienne changer un peu, parfois pour le pire, plus souvent pour le mieux. Heureusement, nous avons toujours le reculé rayon des surgelés pour prendre des nouvelles du deuxième voisin et de son petit dernier.