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Économie
12 novembre 2015 16 h 45

« ON PROTÈGE CE QU’ON AIME, ET ON AIME CE QU’ON CONNAÎT » — JACQUES COUSTEAU

Lyne Morissette

Blogueuse et scientifique

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Pourquoi parler de la mer? Premièrement parce que c’est en Gaspésie qu’est née notre histoire maritime, notre histoire tout court. Mais aussi parce que j’ai à cœur l’avenir de notre Golfe Saint-Laurent et que, mieux on le connaitra, plus on pourra le protéger. C’est de cette phrase de Cousteau que naitra ce qui est selon moi la plus efficace stratégie de conservation jamais mise en œuvre :

« On protège ce qu’on aime, et on aime ce qu’on connait » – Jacques Cousteau

Mais le Saint-Laurent, le connait-on vraiment? Il est le cœur de notre économie, tant au niveau des pêcheries, que du transport ou du tourisme. Le Saint-Laurent, c’est notre histoire, notre culture, notre futur, notre bien collectif. En Gaspésie encore plus qu’ailleurs.

Des records au large de Gaspé…
Cette année, au large de Gaspé, on enregistrait une année record en termes de biodiversité. Les baleines noires, auparavant dans la Baie de Fundy, viennent maintenant visiter le Golfe. C’est par dizaines qu’on les voyait cet été entre la Baie des Chaleurs et le Banc des Américains. Même chose pour les autres espèces : baleines bleues, baleines à bosse, et autres rorquals.
La Gaspésie a connu une année record d’observations, de rencontres et de coups de cœurs avec les grands cétacés. Garde-manger des baleines, le Golfe est aussi notre garde manger à nous : crabe, crevette, turbot, sébaste… les quais de la Gaspésie ont accueilli cet été des bateaux aux cales remplies de trésors destinés à remplir nos assiettes. La richesse d’un écosystème, c’est ça. Et si on veut le chiffrer, eh bien le Golfe du Saint-Laurent nous procure plus de 400 milliards$ par année en biens et services de toutes sortes.

QUATRE CENT MILLIARDS DE DOLLARS!!!
C’est ce qu’on a à perdre, lorsqu’on met en péril cet écosystème pour des projets douteux ou profitables uniquement à court terme. Trouvez moi un projet qui rapporterait autant que ça, moi je n’en connais aucun.

La Gaspésie dans la tourmente
Malgré l’importance évidente que le Saint-Laurent devrait avoir pour les communautés côtières, on constate que de plus en plus de gens, de villes, et de villages tournent le dos à la mer. Tourner le dos à la mer alors que la Gaspésie livre ses plus grands combats environnementaux : contre les pipelines, les forages, la pollution, la dégradation des fonds marins, contre la fermeture des institutions qui font connaitre la mer, comme Exploramer.

Gaspésie, rebelle et insoumise, comme le dit si bien Sylvain Rivière… Aujourd’hui, on dirait qu’à force de se prendre en plein cœur des mauvaises nouvelles les unes après les autres, la Gaspésie s’essouffle, la Gaspésie baisse tranquillement les bras.  Combien de temps avant le K.O. final?
Le temps est venu de se relever les manches et de se réapproprier la mer. Car la Gaspésie, comme le Saint-Laurent, n’appartient pas à une poignée d’industriels, ni à une génération pétrolivore, non. La Gaspésie et le Saint-Laurent appartiennent à nous tous, et surtout à nos enfants. Et il est primordial de s’y reconnecter.

Tourner le dos à la mer, c’est perdre des yeux l’horizon
On ne peut pas protéger notre Saint-Laurent sans créer un réel sentiment d’appartenance envers celui-ci. Quand on perd de vue l’horizon on a tendance à perdre aussi le cap, à se perdre à la moindre tempête. C’est pour cette raison que je crois que la Gaspésie et le Québec en entier doit parler du Saint-Laurent, de ses enjeux, pour le comprendre davantage. Il faut aussi le vivre, le Saint-Laurent; le naviguer, l’explorer, le nager, le plonger, le surfer, à voile ou au bout d’un cerf-volant. Et quand on s’imprègne de la mer, qu’on a l’impression que c’est une partie de notre être qu’on abime quand on l’altère, eh bien là, seulement, on a envie de se battre pour son intégrité. En Gaspésie, l’eau salée coule dans nos veines, c’est l’instinct de survie qui nous fera le protéger. La mer, c’est notre avenir collectif.

L’importance de l’éducation
Personne n’est contre la vertu. Alors que les sondages montrent que la grande majorité des gens veulent protéger la nature, très peu sont prêts à poser des actions concrètes pour le faire. Elle est là, la réelle crise environnementale.

Au cours des derniers mois, les actions les plus concrètes que j’ai vues poser pour protéger la mer sont venues de nos décideurs de demain. Est-ce que la solution à ces menaces qui pèsent sur le Saint-Laurent se trouverait quelque part sur les bancs de nos écoles?  À force de voir des jeunes de 5, 8, 10 ou 13 ans déployer avec créativité des idées pour protéger leur Saint-Laurent, leur avenir, à force de les voir éduquer leurs parents sur nos richesses maritimes, sur l’importance de faire des choix intelligents et de poser des actions concrètes pour l’avenir du grand bleu, je crois que la solution est bel et bien là.

Il est donc primordial que les passionnés du Saint-Laurent, scientifiques, navigateurs, enseignants, conteurs, pêcheurs et autres, prennent un peu de temps pour partager leur passion avec ces jeunes et allumer des étoiles de mer dans leurs yeux. Exactement comme le fait Exploramer et les autres institutions dédiées à la mer qu’on ferme malheureusement les unes après les autres ces temps-ci.

On protège ce qu’on aime, et on aime ce qu’on connait. Qui que vous soyez, par tous les moyens possibles, diffusez cette connaissance et cette passion pour la mer. Il en va de l’état de santé de l’écosystème qui nous fait vivre, et de notre avenir au grand complet.