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6 mars 2016 13 h 33

« SALUT, LA PIOUKE! »

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Françoise Bujold a vu le jour à Bonaventure en 1933 et a été une véritable touche-à-tout, exprimant son talent dans les domaines des arts graphiques, de l’édition, de la poésie, de l’écriture dramatique, de la radio, du cinéma, de la chanson, de l’enseignement et de l’animation. Dans l’une ou l’autre de ces formes d’arts, l’attachement de l’artiste à la Gaspésie constitue une constante, alors qu’elle a laissé l’empreinte de ses pas autant à Percé et Bonaventure qu’à Gesgapégiag et Miguasha.

Après des années d’écriture et de publications, en 1959, Françoise Bujold fréquente le Centre d’art de Percé où Suzanne Guité et Alberto Tommi animent la vie culturelle dans la vieille grange Robin et rassemblent autour d’eux des artistes. Françoise y écrit des contes que des enfants illustrent de linogravures, ce qui donnera naissance aux ouvrages L’île endormie en 1959 et La lune au village l’année suivante. Dans les années 1960, le Centre d’art de Percé fait partie intégrante de ce renouveau culturel associé à la Révolution tranquille qui sort le Québec des années Duplessis et le propulse vers la modernité. À sa façon, Françoise Bujold fait partie de cette révolution qui a, entre autres, vu éclore la chanson québécoise.

Françoise Bujold est d’ailleurs liée à ces artisans de la chanson québécoise. En juillet 1961, elle et son conjoint ouvrent La Piouke, une boîte à chansons ayant pignon sur rue à Bonaventure. Une aventure qui sera de courte durée mais qui verra la nouvelle génération des Pierre Calvé, Hervé Brousseau, Pauline Julien et autres défiler sur cette petite scène. Le nom de la boîte restera accolé à Françoise Bujold qui signera un texte de chanson que Pauline Julien portera sur scène et sur disque.

Durant ces années de grande créativité, Françoise Bujold fait escale dans la communauté de Gesgapégiag où elle travaille avec les jeunes Micmacs. Deux livres d’artistes illustrés par les enfants, soit Une fleur debout dans un canot et La naissance du soleil, découlent de ces ateliers. Sans oublier le film « Le Monde va nous prendre pour des sauvages » portant sur les enfants de Gesgapégiag qu’elle réalise avec Jacques Godbout pour le compte de l’ONF en 1964. Quelques années plus tard, le parcours gaspésien de Françoise Bujold l’amène à Miguasha où elle s’arrête en 1979 pour se laisser inspirer par les fossiles de poissons de la célèbre falaise qui à l’époque accueille ses premiers visiteurs.

Durant ces années ponctuées de séjours en Gaspésie, l’artiste se consacre aussi à l’écriture pour la radio avec quelque huit radiothéâtres pour Radio-Canada, tout en proposant quelques expositions dans lesquelles elle présente peintures, monotypes, gravures et livres d’artistes dans des galeries. Malheureusement, pendant une quinzaine d’années, dans les années 60 et 70, elle devra vivre avec un mal-être lié à des phases maniaco-dépressives. Et c’est finalement des suites d’un cancer qu’elle s’éteint en janvier 1981.

Dans les années subséquentes, plusieurs reconnaissances seront tenues à titre posthume. D’abord en 1982, sera publiée une anthologie sous le titre évocateur de Piouke fille unique. La même année, le Musée d’art contemporain de Montréal expose l’œuvre d’écriture et de gravure qu’elle a réalisé entre 1959 et 1979. Puis deux recueils s’enchaînent en 1984 et 1987. Dans la région, le Musée acadien du Québec à Bonaventure présente une exposition intitulée « Françoise Bujold : fille de la mer » en 1994, alors que, de 1991 à 2000, le Salon du livre de la Gaspésie décerne annuellement le Prix Françoise-Bujold. Sans oublier le fait que la bibliothèque de Bonaventure a immortalisé le nom l’artiste.

Le 8 mars prochain, ce sera aussi l’occasion de souligner, en termes d’actualité récente, le fait que Mary Travers, dite La Bolduc, cette pionnière de la chanson populaire, est entrée dans le cénacle des personnages historiques qui meublent l’histoire officielle du Québec. Et pourquoi pas un petit clin d’œil à toutes les femmes gaspésiennes dont les noms apparaissent dans le livret au pied de l’impressionnante sculpture « En mémoire d’elles », signée Renée-Mao Clavet, qui prend place à deux pas du Musée de la Gaspésie à Gaspé.

Et un p’tit coup de chapeau à toutes les femmes d’ici et d’ailleurs dont la Journée internationale du 8 mars soulignera l’implication et le travail, surtout en cette période d’austérité qui touche beaucoup les domaines de la santé, de l’éducation et de la petite enfance, des domaines qui rassemblent bon nombre de femmes de tout âge. Bon 8 mars à toutes!