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Culture
22 janvier 2016 10 h 20

TERRA NULLIUS

Marie Christine Bernard

Auteure et blogueuse

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Terra Nullius

Il y a des visages
À tous les carreaux de toutes les fenêtres
Il y a des milliers de carreaux
Des milliers des milliers
De carreaux de verre
Suspendus dans les plaines
Sur les collines
Et sur des îles du nord du monde

Il n’y a plus de bâtisses on les a démolies
On a tenté d’ôter la honte
Du paysage

Mais les carreaux sont restés là
Avec les visages dedans

Des visages et des yeux
Et des petites mains imprimées dans le givre
Des milliers de mains gelées

Tous ces adieux figés
Tous ces cris silencieux tous ces yeux toutes ces mains

Tous ces visages
Tendus vers le jour vers la nuit vers le loin vers le proche vers le chaud vers le frette
Vers le rien
Vers le pas d’espoir pantoute

Juste vers autre chose
Que ce qu’il y avait de l’autre bord
Que ce qu’il y avait dedans

Il y a des visages à tous les carreaux et des carreaux d’un océan à l’autre

Et des voix qui chuchotent
Dans des langues étranglées
Des histoires pas contables

Je les vois les visages
Les joues les sourcils
Les dents de lait les petits mentons mouillés

Menton fourchu bouche cousue nez quinquin joue bouillie joue rôtie un oeil deux oeil sourcillon sourcillette

Cogne cogne la caboche
Cogne cogne
Cogne

Cogne à la fenêtre
Pour qui pourrait venir
Te sortir
De là

Cogne

Cogne
Cogne encore

Peut-être qu’à force de cogner le carreau se brisera
Et que tu pourras sortir

T’envoler

Vaut mieux parfois mourir de froid
Et n’avoir jamais existé

Que ça