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15 décembre 2014 16 h 31

Abolition de la CRÉGIM : 26 ans aux oubliettes

GASPÉ -- La Conférence régionale des élus Gaspésie-Îles-de-la-Madeleine (CRÉGÎM) s’éteindra après avoir réuni les leaders de la région pendant 26 ans. Le manque de moyens et d’adhésion des petites municipalités rendra son remplacement difficile, croit le directeur général de la CRÉGÎM, Gilbert Scantland.

Gilbert Scantland est arrivé en 1993 aux commandes de l’ancêtre de la CRÉ, le Conseil régional de concertation et de développement (CRCD), qui existait depuis 1988. « Les dissensions étaient plus fortes, il y avait un manque de vision de développement régional. C’était au plus fort la poche », se rappelle-t-il.

Un épisode comme celui de la Laiterie Baie-des-Chaleurs, à qui un boycott de la pointe gaspésienne en 2000 a donné le coup de grâce, en est un exemple, se souvient M. Scantland. À la fin des années 80, New Richmond et Carleton se sont aussi entredéchiré pour que Québec finance un centre de ski dans leur municipalité, illustre-t-il.

« Les choses ont beaucoup évolué avec le travail fait au CRCD pour développer de grand projets régionaux », estime M. Scantland. Le Réseau collectif de communications électroniques et d’outils de gestion, la Société du chemin de fer et la Régie intermunicipale de l’énergie sont des fruits de la CRÉGÎM. « Ça prenait un fort degré de cohésion. Ça n’aurait pas vu le jour sans la CRÉ. On souhaite que ces organismes continuent de fonctionner [sans la CRÉ], dit le directeur. Mais ça ne sera pas si simple. La CRÉ était au conseil d’administration de toutes ces organisations et elle les finançait. »

La Gaspésie et Les Îles auront besoin d’un lieu de concertation pour maintenir la cohésion, croit M. Scantland, à la fois entre les divers secteurs géographiques mais aussi entre les élus municipaux et le monde socio-économique. « Ce ne sera pas facile, au moment où le gouvernement coupe les vivres aux municipalités et aux MRC », remarque-t-il.
 
Les municipalités gaspésiennes ont déjà des moyens modestes, vu le peu de valeur du parc immobilier taxable. « Pour environ 100 000 habitants, on a 6 milliards de dollars de richesse foncière », estime M. Scantland. Le Bas Saint-Laurent, une région pourtant pas si fortunée, possède le triple de richesse foncière (entre 16 et 20 milliards) pour une population double, compare-t-il.

« Le gouvernement n’a pas pris en compte les capacités financières des territoires. Le monde rural est plus dispersé, moins riche. Ce sont ces communautés qui vont perdre le plus », dit-il.

Gilbert Scantland, le président de la CRÉGÎM Daniel Côté et son vice-président Jonathan Lapierre, ont proposé la mise sur pied d’une nouvelle structure régionale de concertation. Elle jouerait une partie seulement du rôle assumé par la CRÉGÎM et les petites municipalités y auraient davantage accès.

Les maires qui siègent aux conseils des MRC, qui auront droit de regard sur la création d’une nouvelle instance, sont loin d’être tous acquis à la CRÉ. « Pour les maires des petites municipalités, c’est plus difficile de faire une profession de foi envers la CRÉ. Ils n’y ont pas participé », dit M. Scantland.

Le directeur de la CRÉGÎM dit avoir « des craintes sur l’avenir de la Gaspésie et des Îles-de-la-Madeleine ». « J’espère qu’on s’en sortira de façon honorable, mais je n’ai pas l’impression qu’on va réussir à maintenir cette cohésion. Je n’approuve pas [la décision du gouvernement d’abolir les CRÉ]. Ça va être préjudiciable à la région. »
La CRÉGÎM adoptera son plan de fermeture et les modalités de cessation d’emploi le 19 décembre, lors d’une rencontre du conseil d’administration à Gaspé.

Le projet de loi 28 du gouvernement Couillard, qui consacre l’abolition des CRÉ, ne mentionne pas de date finale. Il prévoit que les CRÉ seront dissoutes lors de la sanction de la loi et que les contrats de travail prendront fin 60 jours plus tard.

 Ailleurs en province
 
Les Conférences régionales des élus de la province sont réunies au sein du Réseau des CRÉ du Québec. « Le Réseau n’abandonne pas. On a vraiment l’intention de remettre sur pied des instances régionales », indique Mylène Bédard, conseillère stratégique du Réseau. L’Abitibi-Témiscamingue est la « pionnière » de cette démarche (voir plus bas). Mais « Il y a des défis de financement », tempère-t-elle.

Le gouvernement Couillard créera un nouveau Fonds de développement des territoires de 100 millions de dollars par an. Il viendra remplacer divers fonds qui totalisaient 176 M$. « En fait, c’est une coupure de 76 M$ », précise Mme Bédard.

Le Réseau des CRÉ a tenté de convaincre le ministre des Affaires municipales, Pierre Moreau, de réserver une partie du nouveau fonds à des instances régionales, pour des initiatives inter-MRC. « Ç’a été refusé, rapporte Mme Bédard. Pour le gouvernement, maintenant, les interlocuteurs, ce sont vraiment les MRC. »

Pendant ce temps, en Abitibi…

En Abitibi-Témiscamingue, les administrateurs de la Conférence régionale des élus (CRÉAT) ont voté le 11 décembre pour « confirmer la démarche vers la création d’une nouvelle instance de concertation », dit Jean-Maurice Matte, président de la CRÉAT.
L’abolition des CRÉ « ne fait pas notre affaire, indique M. Matte. Une instance est essentielle au développement et à la synergie des actions […] On est poussés à aller vers [une nouvelle structure] mais la forme et le nom de la nouvelle structure ne sont pas décidés. »

« Pour certains mandats de la CRÉAT, c’est impensable que ce soit géré par des MRC, poursuit le président. On a l’Observatoire de l’Abitibi-Témiscamingue, qui met à jour des statistiques et des tendances, Valorisation Abitibi-Témiscamingue, qui est un programme avec des fonds… Ces projets-là seront basculés vers la nouvelle instance. »
Sans ignorer la question du financement, M. Matte estime qu’il faut d’abord « être solidaire dans ce qu’on fait aujourd’hui ». Le Fonds de développement des territoires ne sera disponible qu’en 2016. Rien ne sert de se battre pour de l’argent qui n’existe pas encore, dit-il en substance.

LA CRÉAT a tout de même envoyé un avis de licenciement collectif à ses 23 employés « mais l’objectif, c’est de garder le maximum d’emplois. »

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