Cimenterie : le gaz naturel serait «l’option la moins polluante»
L’expert américain Neil Carman assure que la façon de réduire l’impact écologique d’une cimenterie consiste à alimenter ses fours au gaz naturel.
C’est ce qu’il a affirmé jeudi soir à Bonaventure, au cours d’une vidéo-conférence organisée par Éco-vigilance Baie-des-Chaleurs.
La présentation du docteur en biochimie a été effectuée en présence d’une centaine de personnes, dont un groupe de la MRC du Rocher-Percé, favorable au projet, alors que les citoyens présents des MRC d’Avignon et de Bonaventure expriment beaucoup de réserve au sujet de l’initiative pilotée par Gisement McInnis.
Selon Neil Carman, l’utilisation du gaz naturel est la seule façon de minimiser les émissions de particules et de gaz toxiques dans l’atmosphère comparativement aux autres combustibles envisagés par Gisement McInnis, le charbon et le coke de pétrole, en tête de liste, ou des carburants utilisés par les autres cimenteries nord-américaines, comme les ordures, les pneus et des déchets industriels.
«Le combustible le plus propre est le gaz naturel, mais je n’ai pas vu de cimenterie alimentée au gaz en Amérique du Nord. Le gaz naturel renferme peu ou pas de mercure», a indiqué M. Carman, qui met ses compétences à la disposition du Sierra Club depuis plusieurs années, après avoir quitté l’Environmental Protection Agency, l’équivalent américain du ministère de l’Environnement.
Choix déterminant
Il a martelé que le combustible choisi par Gisement McInnis sera déterminant pour réduire les émissions polluantes, qu’elles soient de particules ou de gaz. À 1 500 degrés, les gaz peuvent contenir des doses significatives de métaux lourds. Le charbon et le coke de pétrole renferment inévitablement du mercure, a-t-il répété plusieurs fois.
«Un seul gramme de mercure, ce qui équivaut à la taille d’un grain de riz, est suffisant pour contaminer un petit lac et rendre le poisson impropre à la consommation», a notamment souligné le docteur Carman.
Il a fait une liste et une description assez longue des émanations produites par les combustibles apparaissant sur la liste fournie en 1995 par Cimbec Canada, le premier promoteur du projet de cimenterie.
Il faut ainsi s’attendre au relâchement dans l’atmosphère de dioxyde de soufre et de dioxyde de carbone, des hydrocarbures aromatiques polycycliques (HAP), du benzène, des dioxines, des furannes et d’une panoplie d’autres substances associées aux gaz à effet de serre, au cancer et aux maladies respiratoires. «Des systèmes existent pour récupérer une grande partie de ces substances, mais il n’y a pas d’exemple en Amérique du Nord, a-t-il souligné. Avant l’établissement de la cimenterie, il faudrait prendre un an et dresser le profil environnemental de la région de Port-Daniel. Il faut aussi s’assurer que les appareils de mesure et de contrôle des émanations fonctionnent en continu».
Gisement McInnis
En plus des gens de la MRC du Rocher-Percé, des représentants de Gisement McInnis, précisément le nouveau président directeur général Christian Gagnon, l’ex-président de Cimbec Canada, Guy Rousseau, et le relationniste Denis Boucher, ont assisté à une partie de la présentation du docteur Carman.
Devant l’assistance d’abord, et devant la presse ensuite, M. Gagnon, a répété inlassablement que sa compagnie «installera les équipements les plus performants au monde et qu’elle respectera les normes les plus sévères au monde.»
Il n’était pas prêt à donner des détails pour soutenir cet engagement. «On vise un truc vers la fin de l’année», a-t-il, avant de préciser qu’il ne croit pas que toute l’information à diffuser par la compagnie sera disponible en 2012. «On ne contrôle pas la vitesse à laquelle les experts travaillent.»
Quand on lui a demandé si des systèmes de mesure en continu seront installés sur la cheminée de la cimenterie, il a précisé qu’il «y aura des systèmes en continu en relation avec ce que la technologie permet.»
Neil Carman a déjà indiqué qu’en excluant les moments de pannes, il était possible en 2012 de suivre en continu le volume de l’essentiel des émanations d’un complexe comme une cimenterie.
Réactions du public
S’ils ont généré des applaudissements de la part des gens de la MRC du Rocher-Percé, les propos de Christian Gagnon ont eu peu d’effet sur les citoyens de la Baie-des-Chaleurs.
Arielle Paiement, une résidente de Bonaventure, a statué peu avant la fin de la réunion que «tant qu’il [M. Gagnon] n’aura pas accepté de se soumettre à ça [une évaluation environnementale dirigée par le Bureau d’audiences publiques en environnement], ce sont des paroles en l’air».
Les écologistes comme Luc Potvin, d’Éco-vigilance Baie-des-Chaleurs, osent croire que le nouveau ministre de l’Environnement, Daniel Breton, soumettra le projet de Gisement McInnis à la loupe du BAPE.
«Il peut soumettre le projet au BAPE, même si Gisement McInnis en est exclu depuis plus de 16 ans. Ça reste à la discrétion du ministre de changer la façon d’évaluer le projet», a dit M. Potvin.
La cimenterie de Port-Daniel pourrait se traduire par un investissement de 550 à 750 millions de dolars et donner du travail à 100 personnes. Gisement McInnis est contrôlée par Beaudier, le conglomérat d’investissement des familles Beaudoin et Bombardier.
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