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Éditorial
13 octobre 2015 16 h 54

EXPLORAMER : UN DÉLAI RÉVOLTANT

Gilles Gagné

Éditorialiste

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Depuis l’élection d’avril 2014 du gouvernement de Philippe Couillard, le ministre responsable de la Gaspésie, Jean D’Amour, s’est engagé à trouver une solution à long terme pour Exploramer. Il n’a toutefois pas livré la marchandise en 18 mois au pouvoir.

Il demande maintenant à la direction d’Exploramer de retourner « faire ses devoirs ». Une énième fois. En créant un comité visant à développer un « autre modèle d’affaires ». Démagogue, il insiste sur les 2 M$ obtenus par l’organisme en 12 ans.

C’est de la foutaise. Les devoirs sont faits depuis longtemps. Le ministre D’Amour tente purement et simplement d’acheter du temps, une fois de plus, pour permettre à son gouvernement d’atteindre le sacro-saint déficit zéro, une lubie, et ce de manière outrageuse sur le dos des régions rurales.

Sauver Exploramer ne revient pourtant pas à braquer Fort Knox, la réserve d’or américaine. Exploramer a besoin de 265 000 $ par an de l’État québécois pour boucler son budget. C’est, et l’analogie est frappante pour ce lieu de préservation et de reconnaissance du milieu marin, une goutte d’eau dans l’océan. Cette somme représente 35 % du budget total de 752 000 $ d’Exploramer.

Pourtant reconnue pour son excellence
Fondée en 2004 pour prendre le relais d’Explorama, qui vivotait, l’attraction annemontoise est régulièrement citée en exemple au plan national pour son degré d’autofinancement et la qualité de ses activités.

Elle a remporté le prix d’excellence de la Société des musées québécois en 2008. Le dynamisme de l’équipe est palpable. Et la réponse du public traduit bien cet engagement. De 8500 visiteurs en 2004, l’achalandage est passé à 17 000 personnes en 2009, et à 20 000 visiteurs au cours des dernières années.

Alors, comment expliquer qu’une telle somme d’énergie soit nécessaire pour assurer la pérennité d’Exploramer?

Moratoire sur le financement des musées
Le contexte pour le moins troublant de moratoire sur le financement de nouvelles institutions muséales au Québec constitue l’une des principales explications de l’absence de « déblocage » de fonds récurrents pour Exploramer et un ensemble d’autres musées « reconnus, mais non subventionnés à long terme ».

Le moratoire a été imposé en 2001. Par définition, un moratoire est une suspension temporaire. Quatorze ans ont maintenant passé depuis l’instauration de ce moratoire. C’est du long terme, ça. Les derniers gouvernements du Québec, pourtant à la tête d’une société évoluant dans un milieu nord-américain essentiellement dominé par la culture américaine, n’ont pas réussi à comprendre qu’il faut donner de l’oxygène à la culture pour la préserver et lui permettre de s’épanouir.

En situation non précaire culturellement, mais militairement et budgétairement instable, Winston Churchill, alors qu’il était premier ministre du Royaume Uni, durant la Deuxième Guerre mondiale, avait insisté pour protéger le budget consacré à la culture.

Quand on lui a demandé de couper dans le budget des arts pour l’effort de guerre, Winston Churchill a répondu : « Alors, pourquoi nous battons-nous? »

Le déficit zéro, l’objectif si cher à ce gouvernement libéral, est en train d’étouffer nombre d’initiatives valables, dont l’esprit qui anime l’équipe à la barre de cette institution qui rapporte beaucoup, par ailleurs.

Des retombées d’au moins 6 M$/an en Haute-Gaspésie

La direction d’Exploramer qui estime les retombées de ses activités à 6 M$/an se bat pour du financement récurrent depuis au moins 2009, première année de gestion de crise, alors que le manque à gagner de 265 000 $ a été rendu public. Il découlait notamment du retrait du gouvernement fédéral.

La ministre québécoise responsable de la Gaspésie à l’époque, Nathalie Normandeau, comblait généralement une partie de ce manque à gagner annuel, environ 150 000 $, mais depuis son départ de la politique, en 2011, le degré de difficulté a augmenté pour Exploramer.

Il n’y a pas un seul musée rentable au Canada. Il serait ainsi bien injuste de demander à Exploramer de l’être. Il serait tout aussi injuste de cantonner l’essentiel du financement québécois aux musées urbains, qui reçoivent déjà beaucoup.

En fait, il serait intéressant de voir où cette attraction en serait rendue si le travail dévolu à sécuriser son financement avait été consacré à son développement.

Depuis au moins 2009, le bateau d’excursions d’Exploramer ne suffit pas à répondre à la demande. Comment piloter un projet d’expansion si on n’a pas l’assurance d’être là l’année suivante? Que serait l’achalandage d’Exploramer avec un plus gros bateau? Quel serait son ratio d’autofinancement? Les chiffres seraient sans doute supérieurs à ce qu’ils sont déjà, et ils sont remarquablement élevés, malgré la précarité imposée au musée.

Depuis peu, la ministre de la Culture Hélène David tente de faire baisser la pression en faisant miroiter une nouvelle enveloppe de 1 M$ pour un groupe de musées reconnus, mais non subventionnés à long terme. Y aura-t-il de la place pour Exploramer?

En attendant, l’État québécois joue à la roulette russe. Il émousse l’engagement exemplaire des bénévoles du conseil d’administration et la patience des employés qui, comme tout le monde, aspirent à des revenus prévisibles.

Les excuses et les explications du ministre Jean D’Amour pour retarder un appui à Exploramer ne tiennent plus.

Régionalement, ce gouvernement ne coupe pas dans le gras, il sectionne des artères.

Il complique même l’atteinte de son obsessif et idéologique déficit zéro en mettant en péril ses propres revenus de taxation découlant du tourisme.

Si c’est ça, la « gestion responsable », répétons que nous n’en voulons pas.

DEPUIS LA RÉDACTION DE CE TEXTE DISPONIBLE EN PAGE 8 DU JOURNAL GRAFFICI DISTRIBUÉ CES JOURS DERNIERS, LA DIRECTION D’EXPLORAMER A TENU UNE CONFÉRENCE DE PRESSE POUR ANNONCER LA FERMETURE DU LIEU… AUSSITÔT, DURANT LA FIN DE SEMAINE ET ENCORE CE MATIN, UNE VAGUE DE SYMPATHIES ET DE MOBILISATION DÉFERLE, EN PROVENANCE DE DIVERS HORIZONS, POUR SAUVER LE MUSÉE GASPÉSIEN.

GRAFFICI A FAIT POUR VOUS UNE PETITE REVUE DE PRESSE ET VOUS FAIT ICI QUELQUES SUGGESTIONS DE LECTURE POUR SUIVRE L’ÉVOLUTION DU DOSSIER ET PEUT-ÊTRE CONTRIBUER À LA SAUVEGARDE DU MUSÉE.

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Appel à la solidarité pour sauver Exploramer