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11 février 2021 10 h 00

Le caribou, au-delà des chiffres / partie 1

GASPÉ | Si les causes du déclin démographique du caribou gaspésien sont désormais évidentes, la mise en oeuvre des mesures de rétablissement l’est beaucoup moins. Le redressement de la harde, essentiellement tributaire de la qualité de son habitat, implique nombre d’acteurs aux intérêts souvent divergents. De part et d’autre, le caribou s’efface derrière les données servant à soutenir les points de vue. Mais au fond, peu de gens peuvent se targuer de l’avoir un jour fréquenté. GRAFFICI brosse ici le portrait de l’emblématique cervidé à travers le regard d’une citoyenne engagée, d’un photographe de nature sauvage et d’une chercheuse universitaire.


Photo : offert par Margaret Kraenzel

L’écologiste

« C’est en fréquentant le territoire que j’ai appris à connaître l’espèce et rapidement, c’est devenu évident que c’était un emblème de ce qui est sauvage dans la Gaspésie », lance d’entrée de jeu Margaret Kraenzel, enseignante au Cégep de Matane et co-porte-parole du Comité de protection des monts Chic-Chocs. « Pour moi, le caribou, c’est aussi étroitement lié aux vieilles forêts.»

Ces vieilles forêts, elles sont au coeur de l’implication de la biologiste de formation originaire de Gaspé. En 2007, une poignée de randonneurs s’associe afin que soit désignée aire protégée la partie ouest des monts Chic-Chocs, située dans la Réserve faunique de Matane. La partie est, qu’intègre le parc national de la Gaspésie, est déjà légalement protégée.

« Le Sentier International des Appalaches a rendu plus accessibles ces montagnes-là et on se rendait compte, avec le passage du temps, qu’il y avait de plus en plus de coupes en haute altitude qu’on ne trouvait pas durables, explique Margaret Kraenzel. On s’est dit qu’il fallait protéger ces territoires. »

Parmi les espèces touchées par l’exploitation forestière menée dans la réserve faunique se retrouve le caribou. D’abord, parce que le cervidé se nourrit en hiver de lichens arboricoles, flore associée aux vieux peuplements, et que c’est dans ces forêts qu’il trouve refuge. Ensuite, parce que la modification
du paysage forestier profite à d’autres espèces. « Les chemins forestiers et les coupes rendent plus accessible le territoire aux prédateurs », explique la biologiste. « Ceux-ci s’attaquent aux faons et on sait que c’est le plus gros problème pour le recrutement [nombre de nouveaux-nés qui survivront jusqu’à l’année suivante] de la population », ajoute-t-elle.

En décembre dernier, le gouvernement du Québec a annoncé que les monts Chic-Chocs étaient de la liste des nouvelles aires protégées. Sur une superficie d’un peu plus de 200 kilomètres carrés (km2), ceux-ci seront exempts de toute activité industrielle. Certes, le comité visait plutôt une aire de 400 km2, mais cette modification permettra de réduire les perturbations dans l’aire de répartition du caribou. « La protection de l’habitat, c’est vraiment l’action la plus efficace pour cette espèce-là, dénote Margaret Kraenzel. Ça prend absolument une zone tampon tout autour de l’habitat qu’on sait essentiel pour la reproduction. Mais il ne faut pas perdre de vue que cet animal-là est capable de vivre en basses-terres et qu’il y vivait il n’y a pas longtemps. »


Ce caribou mâle, qui a déjà perdu ses bois, a été rencontré en janvier dans le sentier du Lac aux Américains, dans le Parc de la Gaspésie.
Photo : Hugues Deglaire

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