LES CAPRICES DE VIA RAIL
CARLETON-SUR-MER, 9 février 2017 – Au fil des ans, le transporteur de passagers Via Rail, une société publique fédérale, en a souvent fait voir de toutes les couleurs à ses clients gaspésiens. Pourtant, ces mêmes Gaspésiens sont restés fidèles à Via Rail.
Les statistiques d’achalandage indiquent qu’entre 2004 et 2013, le train Montréal-Gaspé a transporté plus de passagers que les deux autres trains régionaux du Québec réunis. En 2011 par exemple, 27 991 passagers ont pris le train gaspésien, alors que les trains Montréal-Jonquière et Montréal-Senneterre combinés en ont transporté 25 870.
Les Gaspésiens accepteraient ainsi avec bonheur le retour du train de passagers de Via Rail à l’est de Matapédia. Depuis la suspension de ce service, en septembre 2013, pour des raisons de « sécurité », bien des Gaspésiens continuent d’utiliser les services du transporteur fédéral, en roulant en auto jusqu’à Campbellton ou Matapédia pour prendre le train Halifax-Montréal, et dans le sens inverse pour le retour.
Cette fidélité à Via Rail est remarquable, considérant l’inégalité du service offert par la firme publique. Par exemple, pendant pratiquement tous les étés entre la deuxième moitié des années 1990 et jusqu’en décembre 2011, dernière année de desserte du train gaspésien entre New Carlisle et Gaspé, l’horaire de Via Rail a souvent compliqué la vie aux Gaspésiens et à leurs visiteurs. En faisant rouler ensemble les trains Halifax-Montréal et Montréal-Gaspé jusqu’à Matapédia, ce long convoi, en période de grand achalandage, accumulait les retards.
En arrivant une ou deux heures en retard à Matapédia le matin, Via Rail coupait pratiquement toute possibilité pour que ce train se rende à Gaspé et qu’il revienne à temps le même soir, afin d’être fusionné au train de Halifax-Montréal, et pour éviter de faire attendre les voyageurs des Maritimes.
Ce train Halifax-Montréal était constitué d’une rame différente du train du matin, de telle sorte que ce convoi du retour partait toujours à temps de la capitale néo-écossaise. Via Rail attendait généralement une « crise », ou une situation incongrue, pour corriger la situation en milieu d’été, en faisant rouler séparément ses trains destinés à Halifax et à Gaspé.
Cette décision de tourner le train à New Carlisle au lieu de Gaspé a souvent mené à des situations incongrues. Ainsi, à l’été 2006, les passagers se rendant à l’est de New Carlisle ont été placés dans des autobus, pendant que les chiens en cage dans le wagon à bagages s’y sont rendus en taxi!
Par un matin pluvieux de mi-juillet 2004, Via Rail a été dans l’obligation de faire descendre près de 250 passagers à Escuminac, parce que la seule locomotive assignée à ce convoi n’était pas suffisamment puissante pour tirer ses voitures-passagers dans une montée. L’incident avait défrayé la manchette, notamment parce que l’animateur Normand Brathwaite était à bord. Amant de la Gaspésie, il se rendait à sa maison de Port-Daniel.
Lors de l’hiver 2009, un bris dans l’une des voitures Renaissance constituant la partie du train se rendant à Halifax a incité Via Rail à faire descendre les passagers gaspésiens du convoi à Saint-Hyacinthe et à faire transférer dans leur section les passagers des Maritimes. Les Gaspésiens ont fait le reste du voyage en autobus.
D’autre part, la beauté du parcours Matapédia-Gaspé dépasse en renommée les frontières de la péninsule. À chaque voyage jusqu’à l’été 2013, quelle que soit la saison, il y avait à bord du train qu’on a longtemps appelé le « Chaleur » des passagers d’un peu partout en Amérique ou ailleurs dans le monde venus spécifiquement pour voir ce parcours. Malheureusement, au fil des ans, plusieurs de ces voyageurs ont été contraints de parcourir la distance New Carlisle-Gaspé en autobus à cause des choix d’exploitation de Via Rail.
La distance entre Matapédia et Gaspé s’établit à 202,4 milles, ou 324 kilomètres. La diversité du parcours comprend de longues sections longeant la mer, des passages en campagne, en forêt, le long de montagnes et même sur des bancs de sable. Le tronçon est ponctué d’un tunnel, à Port-Daniel. Jusqu’au 15 janvier 1990, Via Rail le desservait avec un train quotidien. La fréquence est ensuite passée à trois trains par semaine.
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Ce texte est un complément au dossier Chemin de fer: des opportunités pas vues depuis 20 ans, publié dans le numéro de février du journal GRAFFICI.
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