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14 mars 2012 16 h 06

L’indignée du côté nord

Il y a ceux qui l’ovationnent et d’autres qui n’en peuvent plus de l’entendre. Indignée et fière de l’être, Micheline Pelletier, la mairesse de Sainte-Anne-des-Monts, ne laisse personne indifférent.

Au téléphone, son ton est autoritaire, presque véhément. Des portraits de femmes fortes? Elle a une opinion là-dessus. Et elle vous la fait connaître. «Vous devriez parler aussi de Délisca Roussy [la mairesse de Murdochville]! Je suis prête à lui laisser ma place!», s’emporte-t-elle. En personne, ses 5 pieds 2 surprennent. À l’entendre, on l’aurait cru plus grande.

Micheline Pelletier était à la retraite depuis peu quand elle s’est lancée dans la mêlée aux élections de 2005. Son mari depuis 46 ans, Gaston Synnett, n’était pas d’accord. «Je trouvais qu’elle avait fait sa part.» Pas elle. Mme Pelletier avoue avoir «un sens des responsabilités exacerbé».  Au point où elle a eu du mal, au début de son mandat, à demeurer dans son rôle. Des citoyens passaient à son bureau pour lui demander de la nourriture, rapporte le conseiller municipal Charles Soucy. «Il a fallu qu’on lui dise : « Ça, c’est l’affaire d’autres ressources, du CLSC ».»

Il lui est arrivé – et plus d’une fois – de fondre en larmes en prononçant un discours. Émotive, la mairesse? «Elle pleure en écoutant les nouvelles à la télé», rapporte son mari. Pendant l’entrevue, les larmes lui viennent à deux reprises.

La mairesse a ses détracteurs, qui ont du mal à endurer son «ton» et ses propos. Certains ont lancé au GRAFFICI : «Ah! Non! Vous n’allez pas encore parler de Mme Pelletier!» Jacques Lavoie, ex-maire de Sainte-Anne-des-Monts, l’avait encouragée à se présenter à la mairie. Aujourd’hui, il demande «Où est-ce qu’elle s’en va? On a l’air d’une gang de braillards, et l’entrepreneurship a pris le bord!» D’autres lui reprochent «sa cassette misérabiliste».

Quand on lui rapporte ces propos, Mme Pelletier s’avance sur sa chaise, lève un doigt et hausse le ton. «Ma cassette, c’est celle d’une personne indignée! Il faut passer par l’indignation avant de construire! […] Les gens qui disent ça veulent rester dans leur confort et ne pas voir la réalité. On est des élus. On ne peut pas laisser des gens pourrir dans la dévitalisation!»

«De la mitraillette»

La mairesse a déjà traité un citoyen de «clown» et déclaré que le député Pascal Bérubé avait «manqué son coup». Oui, il lui arrive de regretter ses dires. «Mais d’habitude, je regrette plus la façon dont je l’ai dit que ce que j’ai dit», précise-t-elle.

«J’ai un sens de la répartie qui est de la mitraillette et je fais peur à certaines personnes», admet Mme Pelletier. Toutefois, «elle n’est pas une femme entêtée», assure Maryse Létourneau, qui travaille à ses côtés depuis dix ans dans des organismes de développement. «Face à Mme Pelletier, il faut être armé d’arguments pour la faire changer d’idée. Quelqu’un qui ne l’est pas peut se sentir écrasé», ajoute-t-elle.

Pour comprendre Mme Pelletier, il faut savoir d’où elle vient. Elle articule à l’excès? Sa mère était sourde et lisait sur les lèvres. Pour se faire comprendre, les dix enfants avaient intérêt à articuler. Le goût d’instruire et de s’instruire – elle a fait carrière en éducation – pourrait bien lui venir de son père. Analphabète, il était quand même abonné au journal Le Soleil et demandait à ses enfants de lui faire la lecture.

Le parcours de Mme Pelletier en enseignement n’a rien de classique. «Ma mère, ce n’était pas un professeur, c’était quelqu’un qui démarrait des écoles», résume sa fille, Nathalie Synnett. Dans la grande région de Montréal, elle a travaillé auprès des décrocheurs – elle a fondé une école pour eux –  enseigné le français à des immigrants et œuvré en alphabétisation, avant de regagner sa ville natale pour travailler en formation professionnelle.

Quand elle n’est pas maire, Mme Pelletier est grand-mère. Deux de ses petits-enfants vivent à Sainte-Anne-des-Monts. Et elle s’en occupe. Début janvier, son petit-fils d’un an et demi s’est brûlé avec sa tasse de thé. «J’ai eu tellement de peine! J’en ai eu mal à la poitrine pendant deux jours!», lance Mme Pelletier. «Elle a tout lâché et elle a pris une chambre d’hôtel à Rimouski (où l’enfant était hospitalisé)» , raconte sa fille Nathalie.

Se présentera-t-elle aux prochaines élections? Elle laisse planer le doute. Une chose est sûre : «Elle ne fera jamais de la peinture à numéros», lance sa fille Nathalie.

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