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13 septembre 2019 15 h 53

Réapprendre l’alphabet

Laurie Murphy

Coordonnatrice

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CHRONIQUE | Pour beaucoup, l’alphabet n’est qu’une suite de lettres chantée sur la mélodie d’une simple comptine, un assemblage de pattes et de cercles à apprendre dès la petite enfance, des outils nécessaires pour apprendre à lire et à écrire. Mais que se passe-t-il lorsqu’on prend ces lettres, qu’on les mélange et qu’on leur donne une signification ? On obtient des mots, des phrases, une soupeAlphabitsou encore des acronymes. Certains sont assez connus tels que « YMCA » ou encore « CLSC », mais qu’advient-il de cet acronyme qu’on voit de plus en plus, cet alphabet nouveau genre, celui qui désigne la communauté LGBTQIA+ ? Que veulent dire toutes ces lettres ? Sur quelle mélodie doit-on les chanter pour en comprendre le sens ?

Pour commencer, il est de mise de spécifier quelques informations quant à l’orientation sexuelle. Plusieurs recherches tentent de trouver les origines de l’orientation sexuelle. Quelle en est la genèse ? Apprentissage ? Influence culturelle ? Bagage génétique ?

Malheureusement, plusieurs théories existent, mais aucune d’entre elles n’a encore été prouvée. Une chose est certaine, c’est que l’orientation sexuelle n’est pas un choix ou du moins pas un choix conscient. L’un des facteurs pouvant nous permettre d’identifier cette affirmation est l’observation des comportements associés au refoulement de pulsions sexuelles et leurs conséquences.

Il existe aux États-Unis et dans plusieurs autres pays des thérapies de conversion. Ces « thérapies » ont pour but de « convertir » des membres de la communauté LGBTQIA+ à l’hétérosexualité; or on observe rapidement les effets négatifs de ces séjours supposément thérapeutiques.

En effet, on observe chez ces jeunes des problèmes de dépression, d’anxiété, d’abus de substances et même d’idéations ou de comportements suicidaires. Si l’orientation sexuelle était réellement un choix conscient, on n’observerait pas de comportements reliés à un mal être profond chez les personnes ayant été « converties ».

Dans les prémisses importantes à avoir pour mieux comprendre ce fameux acronyme, il est de mise de faire la distinction entre l’orientation sexuelle et l’identité de genre.

L’orientation sexuelle désigne les préférences et l’attirance sexuelle d’une personne alors que l’identité de genre désigne le genre auquel une personne s’identifie. Le genre peut donc différer de l’appareil génital qui prescrit le genre assigné à la naissance de la personne qui le porte. Un bébé naissant avec un pénis se fera donc assigner le genre masculin alors qu’un bébé naissant avec une vulve et un vagin se verra assigner le genre féminin.

Cependant, il arrive que le genre assigné ne corresponde pas à l’identité de genre. C’est là qu’on voit apparaitre les identités trans dont on entend de plus en plus parler.

Tout comme pour l’orientation sexuelle, plusieurs théories existent pour tenter d’expliquer la provenance de l’identité trans. Malheureusement, tout comme dans le cas précédent, aucune de ces théories ne prévaut sur les autres. Les recherches futures nous éclairerons peut-être à ce sujet.

En attendant, on sait que les personnes trans sont à risque de vivre beaucoup de détresse psychologique en lien avec leur identité de genre que ce soit par un mal-être important, de la victimisation à la suite des premiers balbutiements d’une transition ou du rejet de la part de l’entourage et de la communauté. Il est donc important pour le bien-être et la santé psychologique de ces personnes de rester ouverts et à l’écoute.

Le fameux lexique

Maintenant que la table est bien mise et que l’entrée a été servie, il est temps de passer au plat de résistance : le fameux acronyme, l’alphabet nouveau genre.

Plusieurs versions de cet acronyme existent, le plus long recensé est LGBTTIQQ2SAA. Celui que nous voyons le plus souvent est LGBTQ+. Le + est ajouté par soucis d’inclusion désignant toutes les lettres et identités n’étant pas nommées par celui-ci.

Voici donc la signification de chacune de ses lettres :

L (lesbienne) : Désigne les personnes s’identifiant comme femmes étant attirées sexuellement ou émotionnellement par des personnes s’identifiant au sexe féminin.

G (Gai) : Désigne les personnes s’identifiant comme hommes étant attirées sexuellement ou émotionnellement par des personnes s’identifiant au sexe masculin.

B (Bisexuel.le) : Désigne des personnes qui sont attirées sexuellement ou émotionnellement par des personnes qui s’identifient au sexe masculin et des personnes qui s’identifient au sexe féminin.

T (Identité Trans) : Désigne des personnes dont l’identité de genre et le genre assigné à la naissance ne correspondent pas. Plusieurs autres termes peuvent être associés à l’identité trans, il existe une soixantaine de typologies différentes pouvant être associées à cette lettre. Il peut s’agir d’un fort sentiment d’identification au genre opposé, une personne qui ne s’identifie à aucun genre en particulier ou encore une personne dont le rôle ou l’expression de genre diffère de la norme culturelle pour un genre donné.

Q (Queer) : Le terme Queer est utilisé pour désigner toutes autres personnes refusant de s’identifier à l’une ou l’autre des étiquettes proposées par l’acronyme. Il s’agit plus simplement de personnes ayant des attirances sexuelles ou romantiques en opposition avec les normes dominantes. Le terme Queer était initialement utilisé par des partisans anti-LGBT. Il s’agissait alors d’une insulte homophobe puisque le mot a originalement comme signification « bizarre » ou encore « étrange ». La communauté LGBTQ+ s’est par la suite approprié le terme, qui est devenu aujourd’hui autant une étiquette relative à l’orientation sexuelle et l’identité de genre qu’à une position sociopolitique.

Q (Questionnement) : Les personnes questionnant leur orientation sexuelle ou leur identité de genre et étant encore en exploration quant à celles-ci sont aussi inclus dans l’acronyme.

I (Intersexuel.le) : Les personnes intersexuelles sont des personnes dont les caractéristiques sexuelles présentes à la naissance ne correspondent pas à la définition médicale du sexe féminin ou masculin. Il peut s’agir d’une condition hormonale, anatomique, gonadique ou chromosomique. Le terme « hermaphrodisme » a été longtemps utilisé, cependant, les militant.es intersexuel.les tendent à encourager la population à utiliser le terme intersexuel puisque le terme hermaphrodite peut avoir une connotation péjorative.

2S (Bi-spirituel.le) : Le terme bi-spirituel provient de la culture autochtone. Il s’agit de personnes ayant un esprit féminin et un esprit masculin. Ce terme, cette identité est présente dans plusieurs communautés. Ces personnes ont une importance spirituelle particulière et sont souvent considérées comme des acteurs importants dans la vie spirituelle de certains et de leur communauté. On voit la présence de cette identité bien avant l’arrivée d’explorateurs et de missionnaires européens. Aujourd’hui, ce terme est encore utilisé, mais il est moins présent puisqu’un certain stigma peut y être associé des suites des enseignements coloniaux parfois encore bien ancrés.

A (Asexuel.le) : Désigne les personnes qui ne ressentent pas d’attirance sexuelle envers d’autres personnes. Il est à noter que les personnes asexuelles peuvent ressentir une attirance romantique. Asexualité ne rime pas nécessairement avec aromantisme qui désigne les personnes qui n’ont pas d’attirance sentimentale.

A (Allié.e) : Défini les personnes ne s’identifiant pas comme faisant partie de la communauté LGBTQ+, mais qui soutiennent cette communauté dans sa lutte pour la sécurité, l’égalité, la reconnaissance et la protection des droits.

Il existe encore une panoplie de termes utilisés et d’étiquettes existantes pour désigner et inclure les différents membres de la communauté LGBTQ+. Les termes présentés dans cet article sont ceux dont on entend le plus parler. La communauté LGBTQ+ ayant à cœur l’inclusion de tous ces ses membres tente d’offrir un acronyme des plus inclusif afin de ne laisser personne derrière. Il est cependant important de garder en tête que le monde est en constante évolution, et donc que notre expérience et notre perception de la sexualité et du genre le sont aussi.

Un grand merci à Tim Adams du Centre d’interprétation Micmac de Gespeg pour avoir pris le temps de m’aider à mieux comprendre la bi-spiritualité et à en établir une définition adéquate.