Six premiers mois pénibles de régime libéral
Les six premiers mois de Philippe Couillard à la tête du gouvernement québécois se sont soldés par un échec retentissant en Gaspésie, sur le plan du développement régional.
La seule intervention significative de ce gouvernement depuis le 7 avril touche la cimenterie de Port-Daniel. Elle est survenue le 2 juin et elle consistait en un recyclage, avec quelques ajustements, de l’annonce que le gouvernement précédent avait réalisée le 31 janvier précédent. Elle touchait de plus un projet encore controversé à l’échelle régionale et nationale, notamment sur le plan environnemental, malgré de forts appuis dans la MRC du Rocher-Percé et dans les cercles municipaux et commerciaux.
Il est permis de penser que le gouvernement libéral considère avoir réglé le cas de la Gaspésie pour quatre ans avec la cimenterie, alors que tant de dossiers urgents doivent progresser.
On croirait ce gouvernement en panne totale d’idées, ou aveuglé par les étincelles générées par le chantier de la cimenterie, au point de faire abstraction de questions fondamentales en développement régional, comme la mobilité des personnes et des biens.
La Gaspésie a fait des pas de géants pour freiner la saignée démographique qui l’assaillait durant les années 1990 et le début des années 2000. Ses meneurs socio-économiques, les jeunes surtout, ont retroussé leurs manches il y a 20 ans pour faire de la péninsule, une décennie plus tard, la première région dite éloignée du Québec à afficher un solde migratoire positif chez les 25 à 35 ans.
Pour que cette tendance se poursuive, il faut toutefois doter la région d’outils de base, comme un réseau routier décent, un chemin de fer fiable, des aéroports bien équipés et des quais praticables. En sus de ces infrastructures, on doit retrouver des transporteurs prêts à les utiliser.
Or, rarement depuis 50 ans, la situation de la mobilité des personnes et des biens a semblé aussi précaire en Gaspésie.
En six mois, a-t-on vu un ministre de ce gouvernement venir rassurer la population sur la pérennité du service interurbain par autocar, présentement offert par Orléans Express, filiale de Kéolis? La firme joue des bras depuis qu’elle a signifié à la Commission des transports du Québec son intention d’abandonner les deux tiers de ses services à l’est de Rimouski.
Oui, elle perd de l’argent entre Rimouski et Gaspé, jusqu’à 3,6 M$ l’an passé, si on la croit, mais à travers le Québec, elle a fait de l’argent 11 ans sur 12. S’il faut revoir le modèle, qu’on aille s’asseoir avec Kéolis et qu’on négocie. Il est de plus assez singulier que les centaines de milliers de dollars de revenus venant du transport des colis ne fassent pas partie de l’équation.
En six mois, le gouvernement libéral a laissé moisir la situation du chemin de fer gaspésien, en imitant très bien l’ancienne direction de Via Rail, qui semblait trouver tous les moyens depuis des années pour couper ses services en Gaspésie. Transports Québec retarde l’annonce de financement pour réparer les ponts du tronçon Matapédia-Gaspé, en particulier l’axe Matapédia-New Carlisle, la portion la plus susceptible de générer de bons revenus et de maximiser les retombées économiques.
Le ministre des Transports Robert Poëti et le très discret ministre régional Jean D’Amour ont trouvé toutes sortes d’excuses pour ne pas intervenir dans la réfection du chemin de fer, invoquant le retard dans le dépôt du plan d’action de la Société du chemin de fer de la Gaspésie, l’engagement nécessaire d’Ottawa et l’obligation de soumettre un plan d’affaires.
Pourtant, une moyenne de 13,5 M$ par an a été injectée en 2012 et 2013 dans le rail par les gouvernements libéral et péquiste. On aurait pu comprendre une légère baisse du montant, mais pas un gros zéro. La capacité portante de certains ponts de notre réseau ferroviaire limite présentement le développement de plusieurs entreprises. Est-ce ça, la vision de développement des libéraux?
À quand des tarifs aériens moins chers entre Gaspé et Montréal qu’entre Montréal et Paris? D’autres pays se sont attaqués avec succès à cet enjeu.
L’immobilisme du gouvernement libéral est tel, jusqu’à maintenant, que le ministre Pierre Moreau a tenté de présenter comme une nouvelle positive, les 11 et 12 septembre, un programme d’infrastructures qui se solde par une perte de 7,2 % comparativement au programme antérieur.
En santé et en éducation, il apparaît de plus en plus évident qu’on se dirige vers des centralisations majeures, l’envers de ce dont les régions ont besoin.
S’il fallait donner une note pour caractériser le bulletin de ce gouvernement, elle s’approcherait dangereusement du zéro.