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23 juin 2015 10 h 24

UNE VIE À MOURIR DEBOUT… MAIS RIEN DE PRESSE

CARLETON-SUR-MER – La première fois qu’elle s’est engagée, elle avait 13 ans. C’était dans le club 4H. Elle a vite pris les rênes de l’affaire. Depuis, Myreille Allard s’implique, se dévoue, dirige, accompagne et inspire ceux et celles qu’elle sait si bien entraîner dans ses passions : notamment le théâtre et l’éducation, deux éléments à l’avant-scène d’une vie bien remplie pour cette femme sans âge au quotidien toujours empressé.

« C’est un beau cadeau à laisser à mes enfants, ça! », s’exclame la dame aux valeurs familiales bien ancrées, en feuilletant un cartable de plus de trois pouces d’épaisseur. Elle accepte généreusement de le regarder avec moi, qui fut son élève en français deuxième secondaire et, plus récemment, son assistante à la mise en scène pour le théâtre Clan Destin, troupe qu’elle a mise au monde et qu’elle fait vibrer de main de maître depuis plus de 35 ans.

Tout! Ses passions, ses engagements, les reconnaissances qu’elle a reçues, et elles sont nombreuses, tout est bien rangé et classé en ordre chronologique dans ce cartable.

« C’est là que ça commencé! J’avais 13 ans, Karyne », me dit-elle en me montrant un certificat de distinction des Clubs 4H qui lui a été décerné en 1965 à titre de « gagnante provinciale du concours de Littérature », ainsi que pour « son travail et son esprit d’initiative dans les activités 4H ». « Il n’y avait pas grand-chose à faire à Carleton pour les jeunes à l’époque. Alors j’ai commencé par être membre, je suis devenue chef d’équipe, puis présidente de mon club et je suis devenue agent de liaison pour les clubs 4H de l’Est du Québec, ce qui m’amenait, une fois par année, à aller à des congrès provinciaux. J’ai donc ainsi commencé mon engagement social et bénévole, à 13 ans, avec les Clubs 4H dont la devise était : “honneur, habileté, honnêteté, humanité!” Ça m’est resté! »

« À 13 ans, j’étais pas nécessairement écolo, tu as besoin de t’identifier à un cercle d’amis. Mais mon implication m’a donné comme une empreinte écologique et, encore aujourd’hui, avec quelques années de plus disons [rires], l’engagement écologique, j’y crois. Des décennies plus tard, je plante encore mes 20 à 30 arbres par année. Chez moi, chez le voisin… je m’éparpille partout. Je suis restée très écolo. »

L’artiste de l’enseignement

« J’aurais voulu être peintre! Je dessinais, je faisais de la peinture et je me suis présentée à
l’École des beaux-arts. Ben, ils m’ont refusée. C’était épouvantable ce que j’avais présenté. J’avais pas de talent! Mais je suis allée quand même parce que je suis une capricorne et je vais toujours au bout de mes rêves et au bout des choses que j’entreprends. Et là, je suis revenue à Carleton et je me demandais bien ce que j’allais faire dans la vie. Moi, c’est définitif, comme dans la chanson : “j’aurais voulu être un artiste”! En fait, j’aurais voulu tout faire. J’aurais voulu être décoratrice d’intérieur, conceptrice de mode, la haute couture m’intéressait beaucoup, j’aurais voulu être chanteuse, animatrice de télé […]. Mais là, j’avais 16-17 ans, j’étais ben chez nous. J’étais chouchoutée, on était une belle famille unie, je n’avais pas envie de m’en aller en ville. Pis là, j’ai vu une annonce de l’école normale ici à Carleton qui offrait un cours d’enseignement. Ça fait que j’ai commencé un brevet B pour devenir professeure. »

« Quand t’as la passion., tu fais une bonne job. Pis honnêtement, je ne veux pas me vanter, mais je crois que j’ai fait une bonne job comme prof. J’ai adoré l’enseignement. J’ai vu passer plus de 9 000 élèves dans mes 35 ans d’enseignement. Et je te jure que je peux compter sur les dix doigts de ma main ceux que j’ai envoyés à la direction pour indiscipline. […]. Moi, quand j’étais enfant, je n’étais pas commode dans une classe. Je parlais tout le temps, j’étais un petit peu Ritalin [rires], j’obstinais les profs. Quand j’ai commencé à enseigner, je me disais : il faut que je me mette à la place de l’élève. Moi, j’aimais pas ça me faire agresser verbalement ou me faire ordonner des affaires. Ben, j’ai toujours agi devant mes étudiants comme j’aurais voulu qu’on agisse avec moi quand j’étais à leur place », se souvient l’enseignante en effet des plus appréciées de l’École Antoine-Bernard de Carleton où elle a enseigné le français, puis les arts dramatiques. « Je les aimais! C’était mes enfants. Je les protégeais et je les reconnaissais. J’ai caché Kevin Parent dans mon local le midi pour qu’il puisse jouer de la guitare. Je savais qu’il avait du talent », se souvient l’enseignante passionnée par son métier et impliquée au possible toute sa vie dans la société en général.

Cofondatrice du théâtre d’été La Moluque, ancêtre des Productions À Tour de rôle, présidente du CODEC (Comité de développement culturel) dès les années 1970, fondatrice du Clan Destin en 1979, impliquée plus récemment dans la Virée, membre du conseil d’administration du Quai des arts depuis ses débuts… Myreille Allard est de tous les combats lorsqu’il s’agit de faire avancer la culture ici, et même ailleurs.

« On va dire que j’ai la fibre culturelle et j’ai toujours voulu développer autour de ça. Moi, j’aurais voulu attirer toute la province de Québec en Gaspésie pour qu’on occupe le territoire, mais pour qu’on occupe le territoire, faut offrir des produits et des services, dont des produits et services culturels. Ça passe obligatoirement par là! Et moi, ben j’ai beaucoup d’énergie, faut que je la dépense et c’est là-dedans que j’aime la dépenser. »

L’authenticité, l’honnêteté et l’amour de la famille sont les valeurs qu’elle souhaite avoir transmises à ses trois enfants. « Et s’il y a quelque chose qui est important dans la vie, par-dessus tout, c’est la famille! Je suis une rassembleuse, je suis une colleuse […]. Et l’amitié pour moi est plus importante que l’amour », confie celle que ses anciens élèves et complices culturels appellent affectueusement Mimi, et pour qui la vie mérite encore d’être longue et remplie.

« J’aime pas ça vieillir. J’ai tellement de choses qui me restent à faire dans la vie. J’ai pas le temps de mourir. Et je dis toujours que je ne veux pas mourir malade ou couchée. C’est pour ça que je prends très peu de pauses dans une journée. Parce que je veux mourir debout! »

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