Des mots, des notes et des images ; partie 1/2
La fin des poux?
Orbie
PERCÉ | Avez-vous une seule seconde, en pleine pandémie, songé au pauvre sort des poux, confinés à un seul cuir chevelu en raison de la distanciation sociale? L’illustratrice et autrice Orbie, elle, leur a imaginé mille et une aventures. Les enfants et les plus grands pourront ainsi se bidonner avec La fin des poux?, disponible en librairie dès le 29 septembre.
C’est lors d’une conférence de presse du premier ministre François Legault annonçant les nouvelles mesures de distanciation en vue de la rentrée scolaire 2020 que l’inspiration s’empare d’Orbie.
« Yes! On n’aura pas de poux cette année! » s’est alors dit la maman, dont la famille avait vécu une première expérience en la matière l’année précédente. « La deuxième pensée que j’ai eue, c’est de me dire que les poux ne seraient pas contents », ajoute-telle.
Orbie imagine ainsi des images de poux insatisfaits, pancartes à la main. Au cours de l’année suivante, la maman de Cap-d’Espoir part de ces premiers dessins pour créer un album jeunesse. « Je me suis tellement emportée que je l’ai étiré sur 72 pages. J’ai eu vraiment du fun à écrire cette histoire. Ça s’est d’ailleurs aussi étiré en deux résidences de création », explique celle qui s’est laissée guider par l’histoire.
Dans La fin des poux?, les lecteurs iront à la rencontre d’une colonie installée bien au chaud dans la chevelure de la petite Annette. Quand ils s’y sont multipliés et sont prêts à faire le saut, les sympathiques personnages peinent à trouver d’autres têtes d’enfants à proximité.
« On suit leurs péripéties pour essayer de migrer. C’est quand même drôle. Il y a des moments tragiques, même si ça reste tout le temps dans l’humour », lance en riant Orbie, de son vrai nom Marie-Eve Tessier-Collin. Si le mot pandémie n’est nulle part évoqué, l’histoire se déroule à une époque « où les enfants ne pouvaient pas jouer près les uns des autres ».
Inspirée par les petits moments du quotidien, l’autrice et illustratrice est fière de ce quatrième album jeunesse de son cru, publié aux Éditions des 400 coups. Si elle l’a évidemment créé pour faire plaisir aux tout-petits, elle est loin d’avoir oublié les plus vieux, qu’elle aime voir retomber en enfance. « Un enfant qui aime un livre va vouloir le relire souvent. C’est important que le parent ait du plaisir, lui aussi, à le lire », conclut Orbie.
Page couverture de La fin des poux?, disponible dès le 29 septembre en librairie. Photo : Offerte par Orbie.
La chambre des saisons
Rachel Leclerc
CARLETON-SUR-MER | Alors qu’elle n’avait pas exploré la poésie depuis de nombreuses années, Rachel Leclerc s’y replonge; la prolifique poétesse et romancière gaspésienne a tout récemment lancé, de son propre aveu, son recueil le plus « ambitieux » jusqu’à maintenant : La chambre des saisons.
Disponible en librairie depuis le 7 septembre, le septième recueil de poésie de la Nouvelloise d’origine, publié aux Éditions du Noroît, se décline en trois parties, toutes reliées par le territoire gaspésien.
Alors qu’elle qualifie la première section de « descente en elle-même à travers les saisons », la deuxième aborde la famine qui a secoué la Gaspésie, au début des années 1800. « J’ai pris comme argument poétique cette famine là pour inventer une famille. L’idée, c’était de mettre un peu de chair autour de l’os poétique », résume Mme Leclerc.
Enfin, alors qu’elle avait précédemment abordé les décès de son père et de sa mère, tous deux survenus alors qu’elle était jeune, la poétesse leur consacre, ainsi qu’à sa fratrie, la dernière partie de son recueil. « C’est une façon, je dirais et je l’espère, de clore ce sujet-là en poésie car j’en aurai beaucoup parlé, après ce livre-là. Mais peut-être qu’il me restait à le faire, justement », confie t-elle à GRAFFICI.
Rachel Leclerc l’admet sans détour : La chambre des saisons, qu’elle a peaufiné sur une période de quatre ans, est fort probablement le recueil dont elle est le plus fière. « Je pourrais dire, peut-être, et je dis bien peut-être, qu’enfin, je suis contente du début à la fin de mon livre, ce qui n’arrive pas souvent », lance-t-elle en riant.
Alors que l’écriture poétique lui avait manqué, ce fut un grand bonheur pour Mme Leclerc de la retrouver. La Gaspésienne, qui a créé devant la mer, espère d’ailleurs que son oeuvre contribuera à faire aimer la lecture, plus spécifiquement la poésie.
« La poésie, c’est comme de la beauté et de la lucidité à l’état pur. Le lecteur prend ce qu’il peut, il prend ce qu’il veut, mais il prend toujours quelque chose. C’est ce qui est beau de la relation entre le livre et le lecteur », remarque-t-elle.
Rachel Leclerc, qui a cumulé les distinctions et les honneurs au cours de sa carrière, a peu écrit au cours des derniers mois. La principale intéressée compte néanmoins s’y remettre. Celle qui a publié plusieurs romans dont Noces de sable, Visions volées et La patience des fantômes, compte d’ailleurs poursuivre dans ses élans poétiques.
Après avoir longtemps vécu à Montréal, Rachel Leclerc est revenue en Gaspésie, sa région natale, en 2016. Elle réside à Carleton-sur-Mer depuis 2019. Photo : Gracieuseté de Magali Deslauriers. Photo : Offerte par les Éditions du Noroît.
Doublure du monde
France Cayouette
CARLETON-SUR-MER | Il y a en France Cayouette deux voix portantes : celle des haïkus auxquels elle s’est à maintes reprises consacrée et celle de ce qu’elle surnomme « l’autre poésie ». L’autrice lance, avec Doublure du monde, une oeuvre à mi-chemin entre ces deux mondes qui l’animent. La Gaspésienne, qui se dit « bilingue poétiquement », envoie ainsi aux lecteurs une invitation « à prendre le temps d’être à l’écoute du monde ».
Le recueil, dont le point de départ est une citation de Rainer Maria Rilke, se veut, selon sa créatrice, « un inventaire des petits points de bascule entre le palpable et l’impalpable ».
« C’est comme si je prenais appui sur le concret. J’essaie d’être attentive aux petites brèches qu’il présente et qui mènent vers l’envers du monde, qui peut être le territoire de l’imagination, de l’âme, de la sensibilité », explique la poétesse.
L’oeuvre publiée aux Éditions du Noroît se décline en trois parties. La première, intitulée Batture des paupières, est un hymne aux rituels sacrés et privés du matin. « J’adore ce moment-là où l’on reprend contact avec le monde qui reprend contact avec le monde, qui renaît en même temps que nous au sortir de la nuit », explique-t-elle.
La deuxième partie, Infinis d’occasion, téléporte pour sa part le lecteur dans la sphère publique. « J’essaie de rendre compte de certains saisissements que ce territoire là peut me faire sentir », précise Mme Cayouette.
On y retrouve aussi bien l’enfant que l’on aperçoit à travers la vitre arrière d’un autobus que les réverbères du soir ou les bateaux immobilisés à la marina. « Pour moi, tout est objet de poésie, même les choses qui, à priori, ne semblent pas poétiques », confie la principale intéressée.
La troisième partie, Lumière-mémoire, se veut en quelque sorte un hommage à la vastitude du paysage. « Le paysage guérit tout, pour moi, d’une certaine façon, il dénie tout et il met en relief, dans le fond, notre finitude d’humain et l’espèce d’infinitude du monde », commente Mme Cayouette, qui ajoute que le thème du temps prend également une grande place dans cette portion du recueil.
L’oeuvre de la couverture est celle de Nadia Aït-Saïd. On retrouve d’ailleurs, dans le recueil disponible en librairie depuis le 7 septembre dernier, deux autres créations de l’artiste de Chandler.
France Cayouette est originaire de Bonaventure; elle réside maintenant à Carleton-sur-Mer. La poétesse est depuis peu retraitée du domaine de l’enseignement collégial. Photo : Offerte par les Éditions du Noroît. Photo : Gracieuseté de Magali Deslauriers