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27 mars 2025 11 h 14

Dossier : QUEL AVENIR ATTEND NOS CENTRES DE SKI? – partie 2/2

Les changements climatiques ont considérablement adouci nos hivers gaspésiens. Si la saison froide a été régulièrement caractérisée par des soubresauts au fil des ans, la dernière décennie a démontré que les hivers rigoureux d’antan sont des exceptions. Les centres de ski de la Gaspésie doivent désormais s’adapter à de nouvelles normes. Que leur réserve l’avenir et quels moyens leurs directions entendent-elles déployer pour maintenir les activités qui y sont tenues ? Certains centres de ski survivront-ils à la prochaine décennie ? GRAFFICI se penche sur cette question.

MONT MILLER ; PRIVÉ ET ISOLÉ DANS LES CHIC-CHOCS

MURDOCHVILLE | Le Mont Miller est la seule station privée en Gaspésie. Il y a près de 10 ans, le 11 novembre 2016, le Chic-Chac en faisait l’acquisition. Le centre de ski appartenait auparavant à un organisme sans but lucratif. La transaction prenait un peu les allures d’un sauvetage, la station ayant commencé à vendre des équipements pour payer ses dettes.

Aujourd’hui, la station ne roule pas sur l’or (le Chic-Chac n’a versé aucun dividende à ses actionnaires en 15 ans), mais réussit tout de même à tirer son épingle du jeu. La privatisation a l’avantage de ses inconvénients, et les inconvénients de ses avantages. Financièrement, l’accès à des programmes de subvention est plus restreint. La gestion des infrastructures et des équipements demeure une préoccupation des affaires courantes.

Les propriétaires ont en contrepartie plus de souplesse et d’agilité dans la mise sur pied de leurs projets stratégiques, sans devoir être entérinés par un conseil d’administration. La stabilité à la direction est aussi citée comme un point fort par le cofondateur du Chic-Chac, Guillaume Molaison. « Ça fait une différence. Sans stabilité, les grands projets ne peuvent pas avancer. C’est un des gros avantages. Ç’a permis de mettre de l’avant des stratégies et de saisir des opportunités. La réalité, c’est que les fonds sont plus agiles, mais de trouver les capitaux demeure plus difficile. »

APRÈS LA PLUIE, LE BEAU TEMPS

Cette année, Murdochville a profité d’une excellente saison, avec de bonnes précipitations (après une année désastreuse). Au moment d’écrire ces lignes, à la mi-mars, une soixantaine de journées d’ouverture avait été enregistrée. Force est de constater que les amateurs avaient hâte de renouer avec la neige. La journée d’ouverture, un peu avant les Fêtes, a connu un record d’achalandage.

Le malheur des uns a fait le bonheur des autres. Le Mont Miller a fait le plein de skieurs de Gaspé et des environs en raison du manque de neige sur la pointe gaspésienne. Des amateurs de la baie des Chaleurs ont aussi fait le trajet, profitant des autres attributs de l’organisation comme le domaine hors-piste, le catski, l’hébergement et le restaurant. « On ne se réjouit pas si ça va moins bien chez des collègues ailleurs, mais statistiquement, c’est une de nos meilleures années d’opération. On a aussi changé nos stratégies pour être plus en phase avec l’arrivée de la neige, avec moins de monde sur le payroll toute l’année, qu’on a diminué de 1 million. »

Des départements du Chic-Chac ont aussi été réduits ou coupés, comme le rafting et le vélo de montagne. Le camping du lac York avait aussi été mis en vente, mais l’éventuelle relance de la mine de cuivre pourrait être salutaire. « C’est certain que ça serait un game changer [point tournant] dans l’optique d’avoir un commerce annuel. Ça peut faire partie des grandes solutions et des éléments structurants », note Guillaume Molaison.

CANONS À NEIGE

Comme à Pin Rouge, le Mont Miller procède à de l’enneigement partiel. Même si le village de Murdochville se situe à près de 600 mètres d’altitude, en début de saison, environ la moitié de la piste principale, la Centrale, profite de canons à neige. Toute sa longueur pourrait bientôt avoir le même traitement. « On veut garantir du bas au haut de la montagne éventuellement, c’est ça pour moi la vertu de cette station. Il y a aussi le parc immobilier à revamper à moyen ou long terme », explique Guillaume Molaison.

La neige artificielle pourrait ensuite s’étendre plus au nord, et même dans le domaine hors-piste, un produit d’appel recherché qui pourrait ajouter de l’eau au moulin aux extrémités de la saison. « Ça serait un idéal à long terme. La même neige au Miller va me garantir 100 000 $ de revenus, et ce serait entre 400 000 $ ou 500 000 $ dans le back country alors que c’est le même effort, mais une autre gamme de produits. »

Par Jean-Philippe Thibault

 

LE CENTRE DE PLEIN AIR DE LA HAUTE-GASPÉSIE ; DES BÉNÉVOLES QUI S’ÉPUISENT

SAINTE-ANNE-DES-MONTS | Deux centres de ski sont en exploitation au nord de la Gaspésie : la station des Petits Chic-Chocs à Cap-Chat et le Centre de plein air de la Haute-Gaspésie à Sainte-Anne-des-Monts. Pour ce dernier, c’est un organisme sans but lucratif (OSBL) entièrement bénévole qui gère les activités, sans employé et sans direction générale.

Neuf bénévoles siègent au conseil d’administration, quatre autres s’occupent du damage et 11 patrouilleurs veillent au grain. Les infrastructures et les équipements appartiennent à la municipalité, qui en assure aussi les coûts d’entretien. « Ç’a été laissé à l’abandon pendant plusieurs années, jusqu’à ce qu’un OSBL se crée pour redonner vie à la montagne », résume Hilaire Côté, le président du conseil d’administration depuis maintenant cinq ans.

Des travaux ont notamment été achevés au bar et à la cuisine de la station, grâce notamment à des investissements de la MRC, mais aussi à des soirées-bénéfice et des campagnes de financement. Petit à petit, les activités ont repris et la station compte environ 200 membres aujourd’hui, dans un désir d’être abordable. Le coût d’un billet journalier n’est que de 22 $, alors que la carte d’abonnement est à 190 $. « Notre mission, c’est vraiment de favoriser le sport d’hiver dans toutes les familles. Quand je suis entré en poste, je voyais que la Ville ne trouvait pas que ça fonctionnait très bien, mais depuis cinq ans, c’est l’infrastructure de la ville qui attire le plus de personnes », se réjouit le président.

Sauf que le bénévolat a ses limites. Hilaire Côté a par exemple donné 30 heures de son temps lors de la plus récente Grande bordée, une fin de semaine de festivités pour toute la famille. Le citoyen engagé occupe en parallèle un poste
d’ambulancier à temps plein, avec des horaires de travail de 12 heures par jour. Lui-même amateur de ski, il n’a pas pu pratiquer son sport depuis son entrée en poste au conseil d’administration, trop occupé à gérer les activités courantes.

L’enjeu de la main-d’oeuvre est donc dans le haut des priorités. Il y a trois ans, la municipalité engageait quatre employés pour le Centre de plein air de la Haute-Gaspésie, ce qui n’est plus le cas aujourd’hui. Le conseil d’administration en demandera au moins deux lors de son prochain budget prévisionnel. « Si la Ville nous le refuse, ce n’est pas certain que le conseil d’administration va être encore là. La saison est excellente, mais les bénévoles ont la langue à terre. On est le conseil d’administration, mais là, on fait virer l’entreprise. La gang commence à trouver ça lourd. »

L’idée de fusionner le conseil d’administration avec celui de Vélo des Monts – qui s’occupe des sentiers de la montagne en été – a été lancée. « Des fois, on manque de communication entre les deux, convient Hilaire Côté. Mais je crois que c’est l’avenir pour être plus efficace. Plus ça va, plus ça devient une corvée pour nous. Je vois de l’épuisement au sein de notre conseil qui était extrêmement dynamique. »

Par Jean-Philippe Thibault

 

LE PETIT CHAMONIX ; ÉVALUER L’ENNEIGEMENT ARTIFICIEL POUR ASSURER SES SAISONS

MATAPÉDIA | Les skieurs et planchistes fréquentant le Petit Chamonix ont vécu deux saisons éprouvantes en 2024 et 2025. Les caprices venant des changements climatiques ont limité les jours de glisse à sept il y a un an, et la directrice de la station, Mélissa Anctil, ne croit pas dépasser 20 jours cette année.

L’enneigement artificiel semble inévitable pour assurer l’avenir du centre de ski de Matapédia, fondé en 1962.

« On explore l’enneigement, mais rien n’est décidé. On réfléchit, avec les hivers qu’on a… », dit-elle, sous-entendant que la réflexion est sérieuse.

Un système d’enneigement serait coûteux pour un centre doté d’un budget annuel de 250 000 $. « Ça dépend des solutions adoptées. C’est entre 500 000 $ et 1 million $ », ajoute-telle.

Le Petit Chamonix appartient à la Municipalité de Matapédia. Il est géré par un organisme sans but lucratif. La municipalité verse 65 000 $ par an dans son budget.

Le reste du financement « vient de revenus autonomes […] et on reçoit de l’aide financière pour différents projets. On en reçoit de la MRC [Avignon] pour l’achat de matériel ou des salaires. Je monte des projets pour aller chercher de l’argent à la MRC », ajoute Mélissa Anctil.

Différentes activités – soupers, revenus du bar et location de salle – contribuent à générer des fonds.

MÉLISSA ANCTIL PROJETTE LE CENTRE DE SKI DANS LE FUTUR.

« C’est sûr qu’il y a un avenir. C’est familial et c’est au coeur du village. Les saisons vont se transformer. Le Petit Chamonix ne va pas mourir, mais il va s’adapter […] Dans l’optique d’une diversification des activités sur quatre saisons, il faudra avoir d’autres services. On a demandé à Gabriel Lemieux, de Versant Est, de préparer un plan directeur. On attend le document à la fin mars ou en avril pour nous guider. On veut des activités lucratives, bénéfiques et innovatrices », dit-elle.

La principale compétition du Petit Chamonix vient du mont Sugarloaf, à 20 kilomètres, au Nouveau-Brunswick. « C’est un parc provincial et ils ont de l’argent », souligne Mme Anctil.

Par Gilles Gagné


Photo : Offerte par Le Petit Chamonix

 

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