Nouvelle réalité de Bonaventure
CARLETON-SUR-MER – La première image qui vient souvent en tête des observateurs politiques quand il est question de la circonscription de Bonaventure, c’est la tradition libérale, caractérisée par 52 ans de règne au cours des 58 dernières années.
Toutefois, en 2011, l’instauration de nouvelles limites à la circonscription a modifié cette image, même s’il a fallu deux scrutins pour assister à un changement d’allégeance. L’ajout de Chandler a considérablement changé la réalité, puisque la ville au passé industriel avait souvent voté pour le Parti québécois.
Ainsi, quand l’actuel député péquiste Sylvain Roy s’est présenté pour la première fois, lors de l’élection complémentaire de décembre 2011, scrutin visant à combler le poste laissé vacant par la démission de Nathalie Normandeau, il a augmenté de huit points le score de son parti, en comparaison avec le scrutin de 2008. Le faible taux de participation de 54,5 % avait avantagé les libéraux de Damien Arsenault, en 2011.
Lors de l’élection de septembre 2012, caractérisée par un taux de participation de 68 %, Sylvain Roy l’a emporté par 3 134 voix, alors qu’il avait perdu par 1 952 votes neuf mois plus tôt.
Lors du scrutin du 7 avril, les amateurs de politique auront non seulement le loisir d’assister à une troisième lutte entre MM. Roy et Arsenault, mais ils reverront un retour des cinq candidats de l’élection de septembre 2012, puisque Jean-Marc Landry, pour la Coalition avenir Québec, Patricia Chartier, pour le Québec solidaire, et Louis-Patrick Saint-Pierre, pour l’Option nationale, brigueront les suffrages.
S’étirant sur 275 kilomètres entre l’Ascension-de-Patapédia et Chandler, la circonscription compte 43 430 habitants, dont 30 % qui ont plus de 60 ans et 28,1 % qui ont 29 ans ou moins. Elle compte 6 530 anglophones, une clientèle qui traditionnellement vote surtout pour le Parti libéral. Près de 3 000 autochtones vivent à Listuguj et à Gesgapegiag, mais dans le passé, ils ont peu participé aux élections.
Enjeux économiques
En 1999 et en 2005, le sud de la Gaspésie a perdu près de 900 emplois industriels bien rémunérés suite aux fermetures des usines papetières Gaspésia de Chandler et Smurfit-Stone de New Richmond.
L’économie de la MRC du Rocher-Percé, de laquelle fait partie Chandler, a eu plus de difficulté à récupérer de cette fermeture. Cette ville peine encore à faire aboutir un projet industriel structurant.
New Richmond a mieux réussi en profitant notamment de l’émergence de nouvelles entreprises, dont Rail GD, qui a créé 25 emplois dans la réparation de matériel roulant ferroviaire. De plus, Fabrication Delta a déménagé de Saint-Siméon à New Richmond en 2010, de façon à occuper des locaux plus spacieux, ceux de l’ancien entrepôt de Smurfit-Stone. Sa main d’œuvre a triplé en raison de contrats de fabrication de tours dans le secteur éolien.
C’est pourquoi la pérennité du secteur éolien, qui fera l’objet de débats pendant la campagne, intéressera les électeurs des Plateaux, de la Baie – des-Chaleurs et de la portion ouest de la MRC du Rocher-Percé.
La forêt demeure néanmoins le premier gagne-pain de Bonaventure, si on tient de compte des emplois liés à la récolte, à la sylviculture et à la transformation. Les pêches, principalement à l’est, et le tourisme, un peu partout, sont aussi d’importants employeurs.
Une grande partie de la population de la MRC du Rocher-Percé mise énormément sur le projet de cimenterie de Port-Daniel pour relancer son secteur industriel. Il s’agit d’un projet qui nécessiterait un investissement de 800 millions $ localement. Le Parti québécois a démontré son appui au projet de Ciment McInnis le 31 janvier en proposant une participation de 450 millions $ sous forme de prêts et de capital-actions.
Les groupes écologistes et d’autres citoyens digèrent toutefois mal que ce projet ait été accepté sans processus d’évaluation devant le public.
La population dite « active », selon la définition qu’en fait Statistiques Canada, était composée de 19 115 personnes dans la circonscription, selon le recensement de 2011. Près de 38 % des gens qui travaillent sont employés moins de 40 semaines par an, ce qui indique l’importance du travail saisonnier dans Bonaventure.
Le défi de la formation de la main-d’œuvre demeure un enjeu important dans Bonaventure, avec 24 % des gens de 25 à 64 ans sans diplôme secondaire.
Le revenu d’emploi par habitant s’établissait en 2011 à 28 498 $ par an dans Bonaventure, comparativement à 36 352 $ au Québec. Le revenu par ménage se chiffrait par 52 752 $ annuellement dans la circonscription, alors qu’il était de 66 205 $ au Québec.
Au cours de la campagne, les électeurs ne manqueront pas de soulever la question des infrastructures, notamment l’appui attendu pour la réfection de la voie ferrée entre Matapédia et Gaspé.