Quand cessera l’expatriation de nos jeunes hockeyeurs ?
MARIA | On ne le dira jamais assez, le sport peut être un incroyable moyen de développement des jeunes et ce à plusieurs niveaux. Bien dosé, il peut favoriser la croissance physique, canaliser le surplus d'énergie, augmenter la confiance en soi, créer des contacts sociaux et bien d'autres avantages. De plus, les études démontrent que les jeunes devraient, en bas âge, pratiquer plusieurs sports plutôt qu'un seul.
Évidemment, il n’y a pas que le sport pour favoriser le développement de nos jeunes. Des disciplines comme la musique, le théâtre, la danse et autres, en fonction des intérêts de chacun, peuvent contribuer à leur épanouissement et jouer un rôle facilitant. Cependant, pour la présente chronique, je m’attarderai à la pratique du hockey sur glace et tenterai de répondre à la question posée en titre.
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Bien qu’elles ne soient pas comparables aux programmes des grands centres, les opportunités offertes aux jeunes en Gaspésie sont tout de même assez nombreuses et leur permettent de se réaliser. Que ce soit aux niveaux scolaire, civil ou autrement, une vingtaine de fédérations sportives offrent des services sur notre territoire.
On reconnait cinq niveaux de pratique dans le sport: la découverte, l’initiation, la récréation, la compétition et l’excellence (haut niveau). Pour les sports pratiqués dans notre région, on considère généralement que les trois premiers niveaux sont présents et que c’est moins évident pour ce qui est de la compétition et enfin, que l’excellence est totalement absente principalement à cause du faible bassin de population et de l’éloignement des grands centres.
Généralement, jusqu’à l’âge de 12 ans environ, le jeune sportif peut trouver son compte en région. C’est par la suite que la tentation de la quitter est forte pour les plus talentueux. Toujours pour le hockey, les jeunes qui ont du potentiel et qui souhaitent atteindre les plus hauts niveaux cherchent le meilleur produit pour eux et ils ne le trouvent pas nécessairement en Gaspésie présentement.
Sans pour autant vouloir en faire une profession1, il est normal que celui ayant du potentiel désire se rendre le plus loin possible et ce, le plus longtemps possible. Pour ce faire, il voudra bénéficier du meilleur environnement en termes de conciliation sports-études. Ce n’est pas du snobisme ni de l’orgueil; les jeunes et les parents sont souvent confrontés à de telles décisions. Pour eux, c’est souvent rester et simplement s’amuser (ce qui n’est pas un mauvais choix) ou s’exiler et progresser…
Le hockey à un niveau supérieur permet le développement des habiletés pour le jeune, mais aussi, comme dans tous les sports d’équipe, d’autres aptitudes comme la discipline, le travail d’équipe, le leadership et l’effort soutenu. Il n’y a pas de chiffres officiels à cet effet, mais au cours des dernières années, ce sont des dizaines de jeunes gaspésiens qui, dès l’âge de 13 ans dans certains cas, seulement pour le hockey, sont partis vers l’extérieur.
Quel est ce produit recherché ?
Au Québec, il existe trois principaux types d’encadrement pour le hockey chez les jeunes : le hockey civil par le biais de Hockey Québec (ou Fédération de hockey sur glace du Québec), le hockey scolaire et le programme Sport-études.
Le hockey civil est certainement le plus populaire et le plus répandu dans les régions du Québec. Son fonctionnement repose principalement sur des ressources bénévoles (administrateurs, entraîneurs, etc.) et se déroule surtout après les heures d’école et les fins de semaine.
Le programme Sport-études en hockey sur glace, reconnu par le gouvernement et subventionné par ce dernier, permet aux athlètes qui excellent de recevoir un encadrement adapté sur les plans scolaire et sportif. Le programme Sport-études en hockey le plus près de nous se situe au Collège Notre-Dame à Rivière-du-Loup.
Le hockey scolaire, inspiré du modèle américain (Prep school), offre un modèle hybride entre le hockey civil et le programme Sport-études. Les participants bénéficient d’un horaire adapté qui facilite la conciliation études et hockey. Contrairement au hockey civil, la plupart des entraînements ont lieu le jour. Ainsi, en soirée, les jeunes ont moins à se déplacer et ont plus de temps à eux et pour les études. Pour beaucoup de parents, c’est un mode de fonctionnement plus équilibré. Dans ce genre de programme, même si c’est généralement plus dispendieux, le hockey devient une source de motivation pour la réussite scolaire, puisque les résultats académiques sont pris en compte pour faire partie de l’équipe. Près de nous, l’école secondaire d’Amqui offre du hockey scolaire.
L’école secondaire la plus près qui offre du hockey scolaire est celle d’Amqui avec son équipe l’Assaut. Photo : Geneviève Gagné
Pourquoi nous n’avons pas ces options en Gaspésie?
En Gaspésie, le bassin de population est faible et le territoire immense; conséquemment, les distances à parcourir sont grandes. Ces deux contraintes sont un sérieux frein à la diversité et à la qualité des réseaux de compétition, sans dire pour autant qu’il n’y en a pas. Le hockey civil est assez bien implanté un peu partout dans la région, mais il ne peut répondre à tous les besoins notamment, à ceux des joueurs qui sont destinés à des niveaux supérieurs. Les exigences gouvernementales rendent presque impossible l’établissement d’un programme Sport-études actuellement.
Pour certains, le hockey civil a fait ses preuves, pour d’autres le hockey scolaire est le modèle de l’avenir. Enfin, pour plusieurs un modèle hybride qui rallierait le meilleur des deux pourrait être développé ici.
Quand cessera l’expatriation de nos jeunes hockeyeurs? En fait, probablement jamais. L’idée n’est pas qu’elle cesse complètement, mais qu’elle soit réduite. Il y aura toujours des jeunes qui, pour développer leur plein potentiel ou pour d’autres raisons, choisiront de partir de la région. Il faut cependant garder en tête qu’un jeune qui quitte est un jeune à risque de ne plus revenir et que dans certains cas, il est possible que sa famille l’accompagne …
Des efforts considérables sont déployés actuellement pour, entre autres, attirer des jeunes en région et ça fonctionne. Ce serait bien qu’on en fasse autant pour les inciter à demeurer ici. En ce qui concerne la rétention de nos jeunes hockeyeurs, il n’existe probablement pas de modèle parfait pour la région. À force de persévérance et d’imagination, on pourrait peut-être en créer un? Habituellement, les Gaspésiens sont bons pour innover.
Mettons-nous à la tâche!