Télétravail : attention aux impacts psychologiques
NEW RICHMOND | Avec la pandémie de COVID-19 s’est imposé le télétravail pour de nombreux Gaspésiens et Gaspésiennes. Si s’improviser un bureau à la maison peut paraître fort simple, une mauvaise ergonomie et l’oubli de quelques règles élémentaires pourraient vous laisser de bien mauvais souvenirs de votre expérience.
CARLETON-SUR-MER | S’il importe de porter attention à certains éléments afin de vous assurer que le télétravail ne nuit pas à votre santé physique, il est également nécessaire de garder l’oeil ouvert afin que celui-ci n’affecte pas votre santé mentale.
La psychologue du Centre intégré de santé et de services sociaux (CISSS) de la Gaspésie, Ève Préfontaine, l’admet d’emblée : comme la pandémie, le télétravail touchera différemment les individus. « Notre capacité à nous y adapter va dépendre de différents facteurs, par exemple le contexte familial, le climat à la maison, l’environnement physique, les problèmes de santé mentale préexistants, la nature de l’emploi et l’âge de la personne. Ça fait beaucoup de disparités dans la possibilité de s’adapter. »
Si certains voient de nombreux avantages dans le fait de travailler de la maison, par exemple la diminution des frais de transport, l’économie de temps générée ou une meilleure souplesse de l’horaire de travail, d’autres en subiront davantage les effets négatifs. Pour Mme Préfontaine, les plus grands perdants de ce mouvement massif des travailleurs vers leur domicile, constaté depuis le début de la pandémie de COVID-19, sont clairement ceux et celles qui composaient déjà au préalable avec des troubles anxieux.
« Ceux qui ont plus besoin de se faire rassurer par un encadrement plus formel vont moins bien s’adapter au télétravail », confirme la professionnelle . « Les gens n’ont pas nécessairement fait le choix de se retrouver dans cette situation-là et ce n’est pas quelque chose, dans bien des cas, qui a pu être planifié à l’avance », rappelle également la psychologue.
Deux conséquences psychologiques peuvent principalement découler du télétravail, prévient celle qui oeuvre au CLSC de Paspébiac.
Isolement
Sans surprise, télétravail et isolement vont de pair pour plusieurs personnes qui ne bénéficient plus d’un milieu de travail à proprement parler. La démotivation et la perte du sentiment d’appartenance s’inviteront ainsi dans le quotidien de plusieurs. « Certaines personnes peuvent vivre une espèce de
sentiment d’exclusion et vont avoir peur, d’une certaine façon, d’être oubliées par leur employeur », explique Ève Préfontaine. Cette distance qui s’immisce au sein des membres d’une même équipe tend à rendre les communications plus ardues. Ainsi, il sera plus difficile d’obtenir de l’aide ou des précisions, ce qui tend à accentuer ce sentiment d’isolement.
Plusieurs travailleurs vivront également une certaine confusion quant à l’atteinte ou non de leurs objectifs professionnels. « En étant aussi coupés de leurs collègues et de leurs supérieurs, les gens ont de la difficulté à savoir s’ils en font suffisamment et vont avoir plus de difficulté à évaluer les résultats de leur travail », constate la psychologue. Alors que certains seront écrasés sous une charge de
travail trop lourde, d’autres réaliseront qu’ils peinent à maintenir le rythme de croisière qui
était le leur auparavant. « Ça crée de la détresse chez certaines personnes et de la culpabilité », affirme Mme Préfontaine. Par ailleurs, la difficulté d’adaptation à certains outils technologiques, rendus nécessaires par le télétravail, peut jouer le même rôle, souligne-t-elle.
Perte de frontière claire entre les domaines professionnel et personnel
Le déplacement entre la maison et le bureau fait office, pour plusieurs, de moment tampon délimitant de façon claire les sphères personnelle et professionnelle de leur vie. Pour d’autres, le simple fait d’attribuer à ses activités professionnelles un endroit situé à l’extérieur de la maison, ainsi qu’un horaire déterminé, contribue à ériger une certaine frontière qui peut s’avérer fort bénéfique.
Si certaines personnes n’y voient aucun inconvénient, la perte de cette ligne distinctement tracée peut entraîner des conséquences difficiles à concilier pour d’autres : on parle notamment d’une mauvaise gestion du temps et d’une augmentation de la charge mentale. « Les proches, en étant à proximité de la personne qui travaille, vont souvent se permettre de formuler des
demandes de disponibilité qu’ils n’auraient pas formulées si la personne était absente. Ça augmente beaucoup le stress des gens qui travaillent de la maison et qui doivent tenter de rétablir les frontières de différentes façons », fait valoir l’experte.
Si la situation actuellement vécue par de nombreux travailleurs s’avère beaucoup moins draconienne que celle à laquelle beaucoup de familles ont été confrontées lors du confinement du printemps dernier, il n’en reste pas moins qu’il importe de prêter une attention particulière à cette délimitation,
mentionne Ève Préfontaine.
Voici des petits trucs proposés par Ève Préfontaine pour vous aider à vivre une expérience de télétravail plus positive :
Fixez-vous un horaire et expliquez-le clairement aux personnes résidant sous le même toit que vous; au besoin, apposez une affiche sur la porte de votre bureau.
Attribuez à vos activités professionnelles un lieu précis dans la maison, à l’extérieur des aires communes.
Maintenez la routine matinale que vous aviez auparavant ou établissez-en une nouvelle. Évitez de travailler en pyjama.
Conservez un lien étroit avec vos collègues et vos supérieurs en utilisant, par exemple, les moyens technologiques disponibles.
Clarifiez les attentes de votre employeur.
Mettez-vous des limites et respectez-les, par exemple en évitant de répondre aux appels ou courriels non urgents en dehors d’heures préétablies.
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