Des mots, des notes et des images ; partie 2/3
Visiter le Gaspésie via son passé militaire
LE PATRIMOINE TOURISTIQUE EN GASPÉSIE, PAR JACQUES BOUCHARD
PETITE-VALLÉE | Il y a la route des phares, pour les amateurs d’infrastructures maritimes; les routes des bières et des vins, pour ceux qui préfèrent flâner dans les microbrasseries et
les vignobles; ou encore, les routes des saveurs pour découvrir les produits des artisans du
domaine agroalimentaire. Et pourquoi pas la route de l’histoire militaire?
C’est un peu ce que propose le vétéran des Forces canadiennes et notaire retraité, Jacques Bouchard, dans Le patrimoine touristique en Gaspésie. L’ouvrage a nécessité un travail de moine qui aura duré près de cinq ans. Le résultat est une compilation quasi exhaustive de tout ce qui se rattache de près ou de loin à l’histoire militaire en Gaspésie.
En quatre grands chapitres, celui qui vient de terminer une maîtrise en histoire militaire à l’Université du Québec à Rimouski fait un rappel des événements survenus en territoire gaspésien, recense une foule de bâtiments qui ont servi d’une façon ou d’une autre au déploiement militaire, raconte l’histoire de ceux qui sont tombés au combat et revient sur ces épaves coulées en grande partie pendant la Bataille du Saint-Laurent et qui gisent au fond de la mer.
Les cinq MRC de la région ont ainsi été scrupuleusement scrutées à la loupe. Le visiteur curieux d’en apprendre davantage pourra rouler au gré de son tour de la Gaspésie en découvrant le territoire d’une manière inédite.
Une riche histoire
Un touriste non-averti pourrait difficilement se douter que la Gaspésie a été le seul endroit au Canada à avoir connu des combats semant la mort pendant la Deuxième Guerre mondiale, comme le note l’auteur en quatrième de couverture. Pourtant, des traces de ces événements sont perceptibles un peu partout
sur le territoire à qui sait où regarder.
« Non seulement il y a plusieurs traces, mais dans l’inconscient collectif aussi, ça existe encore. Quand on parle aux gens, la majorité d’entre eux est au courant qu’il y a eu quelque chose ici pendant la guerre, mais ils ne savent pas trop quoi. Souvent, ce qu’il ressort c’est qu’un grand-père a fait l’armée, mais qu’il n’a pas été l’autre bord », explique Jacques Bouchard, faisant référence au conflit armé de 1939-1945.
Pour plusieurs, la première chose venant à l’esprit, en pensant aux artéfacts militaires gaspésiens, est ce blindé léger exposé au parc de la Paix à Rivière-à-Claude, en oubliant cependant qu’un missile air-air datant de la Guerre froide est visible à Sainte-Anne-des-Monts, que l’Aviation royale canadienne a fait installer plusieurs bâtiments temporaires ainsi que quatre tours de radio sur le sommet du mont Jacques-Cartier, ou encore, que ce qui est appelé aujourd’hui la maison Kruse près de la gare intermodale de Gaspé, était un lieu de rencontre privilégié pour les soldats.
« Il y a tellement de choses à raconter sur cette dame qui hébergeait des marins [Gladys Amy LeTouzel, épouse de Walter Alfred Kruse]. Je n’ai même pas écrit une page au complet, mais c’était majeur pendant la Deuxième Guerre mondiale. Les femmes de militaires qui restaient à Fort Ramsay allaient là parce qu’elles
n’avaient pas accès à la base. Ça fait partie de notre patrimoine et notre histoire et pourtant, on n’en est pas informés », se désole quelque peu l’auteur.
Lui-même a beaucoup appris pendant ses recherches, comme par exemple pourquoi deux radars étaient si près, l’un à Rivière-au-Renard et l’autre à Saint-Georges-de-Malbaie. Le premier, où est située aujourd’hui l’antenne de Radio- Gaspésie, servait pour les sous-marins, alors que le second servait à détecter les avions et
les navires de surface ennemis, afin d’alerter le commandement aérien de l’Est situé à Halifax, le cas échéant. « Ça m’avait un peu étonné. Les gens, surtout à Saint-Georges, me parlaient aussi qu’il y avait des avions et une piste, mais ça, c’était des légendes urbaines amplifiées avec le temps. Ça fait partie du travail de recherche », lance en riant celui qui a choisi de poser ses valises dans la municipalité de Petite-Vallée, en 1998.
Bref, la liste est longue à qui voudra découvrir ce parcours culturel et militaire. « Les gens ont gardé des souvenirs, mais pour une raison quelconque, ça ne se parle pas. Pour avoir servi un peu partout au Canada, les Forces armées canadiennes n’ont pas la cote au Québec. Le militaire n’est pas vu ici comme ailleurs. Mais
ça intéresse quand même les gens et on me remercie d’avoir raconté notre histoire », ajoute Jacques Bouchard.
Aucun lancement en bonne et due forme n’a été organisé pour Le patrimoine touristique en Gaspésie, mais des copies sont disponibles à la librairie L’Encre noire de Sainte-Anne-des-Monts, ou encore sur le site web des Éditions de la Francophonie. À noter que la préface a été signée par le colonel Cédric Aspirault de Rivière-au-Renard.
Jacques Bouchard a lancé sans tambour ni trompette Le patrimoine touristique en Gaspésie. Photo : Fournie par Jacques Bouchard
Des mots, des notes et des images ; partie 1/3
Des mots, des notes et des images ; partie 3/3