Des mots, des notes et des images; partie 2/3
Le caribou à travers les yeux des enfants
GASPÉ | Le 16 juin 2022, le Théâtre de la Petite Marée présentait La danse du caribou, un spectacle en hommage à l’animal menacé avec, entre autres, une centaine d’élèves d’une école primaire de New Richmond, joué dans le parc national de la Gaspésie. Près d’un an plus tard, l’équipe derrière la représentation lance un documentaire portant le même nom, dévoilant les étapes de création de l’événement.
« En 2020 et 2021, je travaillais à la création d’un spectacle familial présenté au Centre Bonne Aventure, La Nuit du Caribou, une fable sur la disparition de l’animal, mais je voulais faire quelque chose d’encore plus grand », raconte Francis Richard, metteur en scène de ce spectacle extérieur et directeur général du Théâtre de la Petite Marée, à Bonaventure.
« Inspiré par ma création d’origine, je suis donc allé à la rencontre de 120 élèves de l’école primaire Bois-Vivant afin de transporter une marionnette géante de caribou, créée en partie par eux, au sommet du mont Ernest-Laforce, pour participer à cette action symbolique et engagée, en plein habitat de l’animal », ajoute-t-il.
En plus des enfants, M. Richard s’est entouré de plusieurs artistes de la région. Lors de l’ascension de la montagne, les spectateurs ont pu découvrir des oeuvres réalisées par Bruno Mainville. Puis, en arrivant au sommet, les spectateurs ont pu entendre des louanges littéraires à l’animal, des haïkus par France Cayouette et un kasàlà par Thuy Aurélie Nguyen. L’artiste mi’gmaq Jeannette Martin était également présente afin de partager ses connaissances sur l’importance de l’animal et de son caractère sacré à travers sa culture.
« Avec tous ces artistes-là, Francis tenait à ce que je sois présent afin d’immortaliser l’évènement », ajoute le cinéaste Mathieu Boudreau, qui réalise le documentaire. Véritable passionné de cinéma depuis sa jeunesse, il cumule plus de 20 ans derrière la caméra ayant réalisé plusieurs fictions et reportages diffusés par Télé-Québec et Radio-Canada. En septembre, il a lancé sa compagnie, Phi Productions, qui se spécialise dans la production télévisuelle et cinématographique en Gaspésie.
Le metteur en scène Francis Richard (au centre) prépare les enfants quelques heures avant le début du spectacle La Danse du Caribou. Photo : Fournie par Francis Richard
Un sujet encore d’actualité
Selon le plus récent inventaire aérien du gouvernement du Québec, la harde de caribous se trouvant presqu’entièrement à l’intérieur des limites du parc national de la Gaspésie n’est composée que de 34 individus. Il s’agit d’une baisse de plus de 80 % de la population par rapport à 2007.
« Actuellement, ce qui affecte nos populations, c’est la survie des faons, les petits caribous. Il y en a à peine un sur 10 qui atteint l’âge de six mois et c’est clair qu’avec ça, la population ne peut pas se renouveler. Ce qui affecte autant la survie de ces bêtes, c’est sûr qu’indirectement, c’est l’habitat. La forêt gaspésienne est de plus en plus jeune et ça favorise deux prédateurs : l’ours noir et le coyote, qui avec ce milieu plus frêle, se rapprochent des petits caribous », explique dans le documentaire le guide naturaliste Marc L’Italien, qui soutient que si rien n’est fait, l’animal va disparaître.
Une médiation culturelle à l’école
Durant les cinq mois de création de ce spectacle, les enfants de la deuxième à la cinquième année ont pu explorer une multitude de formes artistiques provenant de partout dans le monde.
« On voulait démocratiser ces formes d’art-là en classe, on leur a fait faire des exercices d’écriture pour enrichir la démarche des artistes poétesses. Les jeunes ont aussi confectionné tous les pompons de soie qui composent le corps du caribou. C’était important qu’ils s’impliquent dans le projet dès le début; ils l’ont dessiné, ont fait des chapeaux en forme de caribou. Je leur ai présenté des ateliers de marionnettistes et tout ce travail a inspiré le créateur du caribou géant », ajoute Francis Richard.
Curieusement, le fait d’avoir une caméra en classe n’a pas semblé faire réagir les jeunes. « Je ne sais pas s’ils sont habitués ou si c’est mon approche, mais ils n’ont pas vraiment réagi. Je suis un grand admirateur du cinéma direct, plus particulièrement de Pierre Perreault et l’une des principales approches de ce courant, c’est de se faire très observateur, très discret et presque invisible », mentionne Mathieu Boudreau.
Le caribou géant, dirigé par le marionnettiste Iker Vicente à sa tête et par une centaine d’enfants de l’école Bois-Vivant de New Richmond, ainsi que leurs enseignants. Photo : Fournie par Francis Richard
Un futur pour le film?
Le documentaire La danse du caribou sera diffusé par la chaîne maCommunauté Telus à plusieurs reprises au cours de l’été, mais Francis Richard ne veut pas s’arrêter là.
« Je ne m’en cache pas, je suis un éternel rêveur. À partir d’un seul projet, j’essaie tout le temps d’en faire au moins cinq. Une résidence à l’école, une performance en sommet de montagne, ça représente un peu cette philosophie, mais là, j’ai envie de l’amener encore plus loin. Déjà, on l’a soumis au festival Les Percéides, et on devrait savoir à la fin du mois de juillet s’il est sélectionné », mentionne Francis Richard, déjà très optimiste pour la suite.
Des mots, des notes et des images; partie 1/3
Des mots, des notes et des images; partie 3/3