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Amélie Dallaire et Jean-Michel Landry, de même que leurs trois enfants Victor, Flavie et Xavier démontrent ici la qualité de ce que l'on peut dégoter dans des comptoirs économiques. Tous ces morceaux usagés ont été payés à moindre coût.
7 février 2020 15 h 27

Des vêtements qui font du bien… trois fois plutôt qu’une!

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CARLETON-SUR-MER | Sous-sols d’églises, centres communautaires, marchés aux puces, centres d’action bénévole : les adeptes du magasinage d’articles usagés savent bien où faire des trouvailles vestimentaires à prix modique en Gaspésie … Mais le font-ils aux dépends des personnes plus vulnérables qui, elles, n’ont pas le luxe de choisir?

Les Dallaire-Landry répondent spontanément à l’appel lancé par GRAFFICI : ils accueillent même le journal indépendant, tous cinq parés de vêtements achetés à 50 sous, à un ou à deux dollars. Les membres de cette sympathique famille de Carleton-sur-Mer font le choix réfléchi de majoritairement se vêtir d’usager et ne s’en cachent pas. Environnement, variété et économies les motivent notamment.

Le comptoir Le Baluchon de Maria constitue leur premier réflexe en termes de magasinage de vêtements; ils y font toujours un saut avant de se diriger vers les boutiques traditionnelles ou les sites d’achats en ligne. Les parents, Amélie et Jean-Michel, expliquent que cette façon de faire correspond en tous points à leurs valeurs.

Responsable de l’achat des vêtements pour les trois enfants du couple, la maman ne revient jamais les mains vides. Amélie Dallaire, qui a l’impression de donner au suivant lorsqu’elle rapporte ensuite des vêtements sur place, se fait d’ailleurs un point d’honneur de préciser le prix payé pour chaque article lorsqu’on la complimente sur ses tenues ou sur celles de la fratrie.

Victor, sept ans, ainsi que les jumeaux Flavie et Xavier, bientôt âgés de cinq ans, se prêtent au jeu avec intérêt. « Ce qui est absolument drôle, quand j’arrive avec des vêtements, c’est qu’ils ont le réflexe de se demander « ils étaient à qui avant ». Ça, c’est leur gros fun! Ils sont vraiment contents de porter des choses qui ont déjà appartenu à d’autres enfants », confie la mère.

Amélie enseigne au cégep alors que Jean-Michel œuvre dans le milieu municipal. La situation financière des deux professionnels leur permettrait, s’ils le désiraient, d’opter en priorité pour du neuf. La maman admet s’être déjà posé la question que plusieurs se poseront sans doute : « Au début, je me demandais si je pouvais y aller, si j’allais enlever des vêtements à d’autres qui en ont plus besoin ».

Des gestionnaires de friperies expliquent pourquoi ils voient d’un très bon œil l’habitude prise par les Dallaire-Landry et par les autres familles bien nanties qui optent pour les comptoirs économiques. Voici leurs trois arguments pour vous convaincre de passer, vous aussi, leur rendre visite.

1 : Pour financer des services

Le Baluchon, comme d’autres comptoirs gaspésiens, constitue une source de financement pour les activités et services d’un organisme : dans ce cas-ci, il s’agit du Centre d’action bénévole (CAB) Saint-Alphonse–Nouvelle. Entre 73 000 $ et 75 000 $ par année s’ajoutent ainsi à son budget. « Grâce à ça, on crée de l’emploi et on fait tourner l’économie. En plus, ça fait l’affaire de bien des gens », explique le directeur général du CAB, Régis Audet. Une quarantaine de bénévoles s’activent sur le plancher et dans l’arrière-boutique. Une responsable est salariée, en plus du concierge qui veille à l’entretien des lieux.

Le comptoir 100-FLA-FLA de Sainte-Anne-des-Monts, où l’on trouve des vêtements, mais aussi un éventail d’autres articles, amène quant à lui de l’eau au moulin au centre pour femmes violentées Louise-Amélie, via sa fondation. Tenue à bout de bras par une vingtaine de bénévoles et lancée il y a un an à peine, la petite boutique contribue à venir en aide aux mamans et aux enfants qui ont recours à la vingtaine de lits permanents de la maison d’hébergement.

Qui plus est, le 100-FLA-FLA sert depuis octobre de lieu de réinsertion sur le marché du travail à plusieurs femmes via le programme PAAS-Action. « On a une petite section qui s’appelle les Créations 100-FLA-FLA. Ce sont des choses qu’elles confectionnent en partie avec des articles que l’on retrouve à la boutique. […] Elles sont aussi inclues dans l’équipe pour le service à la clientèle », explique la directrice du Centre Louise-Amélie, Monic Caron.

2 : Pour contrer l’ostracisation

Lors de ses premiers balbutiements il y a 32 ans, Le Baluchon de Maria était clairement identifié comme un « comptoir d’entraide ». Ironiquement, cette appellation dissuadait beaucoup de personnes qui auraient eu besoin de recourir à ses services. Or, les temps ont changé. « Ce n’est plus marginalisé. Les gens qui viennent, c’est monsieur et madame-tout-le-monde », se réjouit Régis Audet. Des locaux attenant au CAB abritent désormais la version 2.0 du Baluchon; on en a fait une petite boutique accueillante où tous se côtoient.

Cette ouverture au grand public contribue, croit M. Audet, à soustraire de l’ostracisation ceux et celles qui n’auraient pas les moyens d’aller ailleurs. « Ce n’est pas parce qu’on a des difficultés financières qu’on doit avoir toujours l’impression d’être à part, dans un système dont on est les seuls à bénéficier », fait-il valoir. Mme Caron abonde dans le même sens. « Pour plusieurs personnes dans une situation plus précaire, il peut y avoir une fierté d’avoir acheté leurs vêtements », rappelle-t-elle.

3 : Pour la planète

À une époque où les préoccupations environnementales sont plus que jamais à l’ordre du jour, les gestionnaires de comptoirs vestimentaires se félicitent de contribuer à améliorer le sort de la planète en offrant plusieurs vies au même article. « Au Baluchon, on vend souvent des morceaux qui ont été donnés trois fois », fait remarquer M. Audet.

À leurs yeux, les clients qui choisissent les comptoirs économiques font réellement une différence. « C’est un beau geste à poser. Ça démontre qu’on a l’environnement à cœur », fait valoir Régis Audet. « On est dans une société de grande consommation, le volume d’items que l’on reçoit nous le confirme chaque semaine. Des vêtements, on en a des tonnes et on a de très belles choses », renchérit pour sa part Mme Caron, qui note que le phénomène est à la mode.

D’ailleurs, les sacs de plastique ont récemment été bannis du comptoir de Maria, mettant ainsi fin aux traditionnels « baluchons à cinq dollars ». M. Audet appréhendait une réaction négative des usagers; celle-ci n’est jamais venue. L’industrie du textile est généralement reconnue comme la deuxième ou la troisième filière la plus polluante de la planète.

Le Baluchon, qui a récemment fait l’objet d’améliorations, a été aménagé comme une réelle boutique dans le but précis d’attirer le grand public.