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8 juillet 2024 9 h 02

Des mots, des notes et des images ; Marie-Ève Trudel Vibert

La fille du bout du monde, tome 2 de 10 par Marie-Ève Trudel Vibert

GASPÉ | Il y a un peu plus de 10 ans, en mai 2014, Marie-Ève Trudel Vibert nous plongeait avec La fille de Coin-du-Banc dans son univers aux effluves iodées, avec des personnages un peu poqués mais authentiques, naviguant dans leur quotidien gaspésien à travers le refus de la maternité et en filigrane une relation mère-fille pas toujours au beau fixe, le tout dans cette vieille et craquante (dans les deux sens du terme) Auberge de bord de mer.

Aujourd’hui, l’autrice fait le saut à nouveau en offrant une deuxième tranche de son épopée avec La fille du bout du monde, un court roman de 130 pages qui, comme son titre l’indique, pose ses valises à Gaspé. Cette fois, l’action se tisse autour de Jamie Harbour Mabe, rencontrée à la fin du tome précédent et dont le projet de vie est de (re)tomber enceinte, à la suite d’une fausse couche à 24 semaines de grossesse.

« Elle ne s’en est pas remis. Elle est un peu en dépression et boit beaucoup d’alcool pour passer à travers ses journées. On la voit évoluer le temps d’un cycle menstruel en essayant de survivre et de se projeter dans le futur », explique la romancière.

Les personnages ont cependant beaucoup de répartie et s’en dégage un ton loin d’être monochrome et à sens unique, histoire qu’autant l’ombre que la lumière puissent cohabiter et avoir leur espace. « C’est fait avec beaucoup d’humour au travers pour alléger tout ça. Il y a beaucoup de femmes qui m’écrivent pour me remercier et me dire que ça leur a fait du bien, parce que c’est encore tabou de parler de fausse couche. Je pense que ça aide à mettre un baume ou à tout le moins à ouvrir la discussion. C’est aussi un peu le but dans mon écriture. »

Marie-Ève Trudel Vibert ne s’en cache pas : Jamie Harbour Mabe est son alter ego littéraire, très assumé, précisant au passage qu’il s’agit bien d’une autofiction et que par définition, certains passages reposent sur des éléments vécus, mais extrapolés, distordus, magnifiés ou réimaginés. L’autrice se gardera donc de départager publiquement expériences personnelles et fictives.

« J’ai décidé de ne plus répondre à ces questions-là parce qu’après La fille de Coin-du-Banc, il y avait des questions vraiment intimes. Marine par exemple, je lui fais faire un adultère alors les gens pensaient que ma mère avait trompé mon père, lance-t-elle en riant. Mais je peux dire que j’ai connu un parcours de fertilité difficile et je m’en suis servi comme matière pour celui de Jamie, mais amplifié parce que j’avais envie d’aller plus loin pour montrer que ça peut créer pas mal de remous. »


Marie-Ève Trudel Vibert lors de « l’élancement » de La fille du bout du monde en mai, au Berceau du Canada à Gaspé. Photo : J ean-Philippe Thibault

Vers une décalogie

S’il a fallu compter 10 ans entre La fille de Coin-du-Banc et La fille du bout du monde, les prochaines parutions devraient être beaucoup moins espacées. Parce que oui, l’univers de la romancière se poursuivra, ayant déjà partagé avec ses fidèles lecteurs quelques détails de son troisième titre. Le narrateur sera par exemple un homme de la lignée des Mabe. Il s’agira aussi d’un antépisode, qui se déroulera donc avant l’action des deux premiers.

Un peu à l’image des grandes fresques littéraires françaises du XIXe siècle – comme celle des Rougon-Macquart d’Émile Zola dépeignant plusieurs facettes d’une même époque – le but avoué est d’écrire 10 tomes de cet univers gaspésien. Pendant la pandémie, Marie-Ève Trudel Vibert a profité de son temps pour recentrer une partie de ses intérêts vers son univers littéraire, en écrivant les grandes lignes de sa propre fresque.

La fille du bout du monde sera stratégique à plusieurs niveaux, ajoute l’autrice, laissant planer que les personnages rencontrés ici auront leur importance dans la suite des choses. Le mur d’une pièce chez elle est entièrement dédié à ses personnages et ses idées, avec la structure des liens et des événements qui les uniront. « J’ai un peu de contenu pour chaque tome. Ç’a avancé dans les dernières années et aujourd’hui je m’engage à en sortir un par année », assure-t-elle, visant le temps des Fêtes 2025 pour la parution de son troisième ouvrage.

D’ailleurs, faut-il avoir lu La fille de Coin-du-Banc pour comprendre le deuxième volet? « Idéalement, parce que je l’ai pensé stratégiquement pour que ce soit central; que tous les autres découlent ou répondent à des questions qu’on s’y pose. Mais l’inverse est possible aussi », précise celle qui possède une maîtrise en psychosociologie.

Quelques exemplaires de La fille de Coin-du- Banc sont toujours disponibles à Percé chez Nath & Compagnie, et des réimpressions sont déjà prévues. La fille du bout du monde se retrouve, quant à lui, dans toutes les bonnes librairies de la Gaspésie, ou encore sur le site Web des Éditions 3 sista. L’autrice invite d’ailleurs tous ceux qui veulent en savoir davantage sur son univers à la contacter via les réseaux sociaux. « Je suis disponible et ouverte; je veux avoir la rétroaction des gens », conclut-elle.

À noter en terminant que le projet de court métrage de La fille de Coin-du-Banc dont GRAFFICI faisait mention en juillet 2022 suit son cours. Le scénario final a été envoyé à la SODEC pour une demande de financement et un tournage potentiel pourrait suivre au mois d’août, si le projet est accepté.

 

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