Dossier pêche 5/5 : Le type d’engin
À la même période l’an dernier, GRAFFICI publiait un dossier à propos de la pêche au sébaste. À ce moment, le feu vert n’avait toujours pas été donné pour sa capture commerciale. Bien de l’eau a coulé sous les ponts depuis. Aujourd’hui, la ressource demeure abondante. Même si les pêcheurs ont finalement obtenu leur autorisation pour se lancer à son assaut, les défis demeurent multiples et complexes. C’est d’autant plus vrai qu’ils sont en partie imbriqués avec les enjeux entourant la crevette nordique, dont dépendent environ 1000 emplois directs et indirects dans le Grand Gaspé seulement. Voici un résumé de plusieurs facettes pour bien comprendre le phénomène.
Le type d’engin fait toute la différence dans la pêche au sébaste, selon Dominique Robert
SAINTE-ANNE-DES-MONTS – En marge de la réouverture de la pêche au sébaste, les pêcheurs ont-ils raison de s’inquiéter du retour des bateaux de plus de 100 pieds dans le golfe du Saint-Laurent? Le professeur Dominique Robert de l’Institut des sciences de la mer (ISMER) de l’Université du Québec à Rimouski (UQAR) se préoccupe plutôt de l’engin de pêche utilisé, soit le chalut qui racle le fond, que de la longueur des bateaux. Cette inquiétude est partagée par les pêcheurs.
« C’est un engin peu sélectif, soulève-t-il. On peut se penser au-dessus d’un banc de sébastes et quand on le remonte, il peut y avoir beaucoup de prises accessoires, avec plusieurs autres espèces comme le turbot ou le flétan de l’Atlantique. »
Comme le type d’engin utilisé est peu sélectif, un danger guette ainsi les espèces à statut particulier comme la merluche blanche, dont l’aire de distribution se situe dans les mêmes profondeurs que le sébaste. Si les taux de captures accidentelles de certaines espèces sont trop importants, un enjeu de taille risque de se présenter, de l’avis de M. Robert. « On pourrait en venir à fermer certaines zones de pêche comme on le fait pour protéger la baleine noire. »
Le titulaire de la chaire de recherche du Canada en écologie halieutique ignore le type d’engin qui est utilisé pour la pêche au sébaste. M. Robert mentionne cependant que certaines techniques sont à l’étude pour pêcher cette espèce autrement, dont davantage en surface. « Il y a plusieurs types de chalut qui sont faits pour labourer le fond, dont ceux avec un bourrelet. » Par conséquent, le chalut avec un bourrelet n’est pas désigné pour la pêche au sébaste, estime le scientifique.
En somme, il croit que la pêche au sébaste devra être pratiquée avec précaution. « Ce serait important d’avoir des observateurs en mer pour que ce soit une pêche propre, d’autant plus qu’après 30 ans de moratoire, on a perdu l’expérience de cette pêche-là et parce que le golfe a changé, ajoute-t-il. La réalité, c’est que le Saint-Laurent se réchauffe. Ce serait aussi intéressant d’avoir des données de la pêche au sébaste pour savoir quelles espèces sont pêchées, en plus de ce poisson. » À partir des données qui pourraient être obtenues et à la lumière de l’historique de cette pêche, M. Robert croit qu’une grande réflexion sera nécessaire.
Le professeur Dominique Robert de l’Institut des sciences de la mer (ISMER) de l’UQAR se préoccupe plutôt de l’engin de pêche utilisé, soit le chalut qui racle le fond, que de la longueur des bateaux de pêche au sébaste. Photo : Johanne Fournier
Pour lire tout le dossier Pêche :
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